L'année 2003 a été particulièrement dense sur le plan contentieux, tant par le nombre de décisions rendues par le Conseil d'État, une quarantaine, qu'au regard de la portée de plusieurs d'entre elles. Comme chaque année, l'octroi des fréquences aux services de radiodiffusion sonore a occasionné un grand nombre de recours dont l'examen a conduit le Conseil d'État à préciser le sens des dispositions de la loi du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication.
Mais l'apport le plus important de la jurisprudence concerne les autres domaines du champ de compétences du Conseil supérieur de l'audiovisuel, en particulier celui de la télévision numérique terrestre où l'outil contentieux a contribué à amorcer le lancement de cette nouvelle technologie.
Les autres contentieux sont relatifs, notamment l'application du dispositif anticoncentration, aux sanctions administratives et au contrôle des programmes. Dans ce dernier domaine, plusieurs décisions ont été largement commentées, en particulier celles sur l'interruption publicitaire de l'œuvre cinématographique Titanic et la qualification d'œuvre audiovisuelle de l'émission Popstars .
Le contentieux relatif à l'attribution des fréquences
de radiodiffusion sonore
LA DÉTERMINATION
DES CATÉGORIES
DE SERVICES
2e alinéa de l'article 29 de la loi : « Pour les zones géographiques et les catégories de services qu'il a préalablement déterminées, le Conseil publie un appel aux candidatures [...] ».
Afin de garantir la diversité du paysage radiophonique en sauvegardant un tissu de radios associatives et en favorisant le développement de radios locales commerciales indépendantes face aux grands réseaux nationaux, la loi du 17 janvier 1989 a confié au Conseil supérieur de l'audiovisuel le soin de définir des catégories de services radiophoniques.
Dans ses communiqués n° 34 du 29 août 1989 et n° 281 du 10 novembre 1994, l'autorité de régulation a déterminé cinq catégories de services (1). À plusieurs reprises, le Conseil d'État s'est prononcé sur la compétence du CSA pour énumérer les catégories de services et déterminer les caractéristiques permettant de définir chacune d'elles (2). Par une décision du 2 juin 2003 (3), le Conseil d'État a confirmé qu'au nombre des caractéristiques des catégories de services, le Conseil supérieur de l'audiovisuel pouvait décider qu'une catégorie serait réservée aux services associatifs éligibles au fonds de soutien à l'expression radiophonique institué par l'article 80 de la loi du 30septembre 1986 modifiée et écarter la candidature d'un service dont les modalités de financement ne correspondent pas à la définition de cette catégorie.
LA MISE EN ŒUVRE DES CRITÈRES DE SÉLECTION
Les critères du pluralisme des courants d'expression socioculturels et
de la diversification
des opérateurs
8e alinéa de l'article 29 de la loi : « Le Conseil accorde les autorisations en appréciant l'intérêt de chaque projet pour le public, au regard des impératifs prioritaires que sont la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socioculturels, la diversification des opérateurs [...] ».
Le principe de diversité des programmes, visé à l'article 1er de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, dont découlent les impératifs prioritaires de pluralisme des courants d'expression socioculturels et de diversification des opérateurs, fixé au 8e alinéa de l'article 29 de la loi précitée, suppose que le Conseil supérieur de l'audiovisuel retienne les candidatures des services qui, par leur caractère local (4) ou leur programme inédit (5), sont susceptibles de répondre aux attentes du plus large public dans la zone.
Par une décision du 21 novembre 2003 (6), le Conseil d'État a jugé que, sur le fondement de ces principes, le Conseil supérieur de l'audiovisuel pouvait écarter la candidature d'un réseau musical national supplémentaire de catégorie D au profit, d'une part, de celle d'un service généraliste de catégorie E absente dans la zone, d'autre part, d'un programme inédit dans la zone dès lors notamment qu'un autre service de catégorie D visait des publics d'âges comparables et diffusait des programmes caractérisés par une dominante musicale de variétés contemporaines. Le juge a également confirmé le rejet de la candidature d'un programme musical national au profit de deux radios proposant des programmes locaux (7). Le Conseil d'État a enfin jugé (8) que le critère de l'intérêt du projet pour le public pouvait être invoqué par le Conseil supérieur de l'audiovisuel pour retenir la candidature d'un programme « qui était diffusé dans cette zone depuis mars 1998 et bénéficiait d'une audience dans le département des Vosges de telle sorte que la cessation de ce programme serait de nature à mécontenter un auditoire important et fidèle ».
Le critère de l'expérience acquise dans les activités de communication
9e alinéa de l'article 29 de la loi : « Il tient également compte : 1° de l'expérience acquise par le candidat dans les activités de communication [...]. »
Après avoir jugé que ce critère de l'expérience acquise par le candidat dans les activités de communication est relatif au professionnalisme des opérateurs et ne peut être opposé aux candidats qui ne bénéficient pas d'une expérience dans une zone donnée (9), le Conseil d'État a fait application en 2003 de sa décision de principe du 13 décembre 2002 (10) selon laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut apprécier les mérites respectifs de candidatures concurrentes en se fondant sur l'expérience acquise par chacun dans les activités de communication (11). Ce faisant, le Conseil d'État ne reproche plus au CSA d'avoir utilisé ce critère afin de départager deux concurrents expérimentés (12) mais admet désormais que le CSA peut évaluer leur « savoir-faire » respectif indépendamment de leur ancienneté dans le secteur audiovisuel.
Le critère du financement et des perspectives
d'exploitation des services
9e alinéa de l'article 29 de la loi : « Il tient également compte : 2° du financement et des perspectives d'exploitation du service notamment en fonction des possibilités de partage des ressources publicitaires entre les entreprises de presse écrite et les services de communication audiovisuelle [...]. »
Parmi les critères secondaires de sélection des candidatures, le Conseil supérieur de l'audiovisuel tient également compte du financement et des perspectives d'exploitation du service. Par une décision du 21 novembre 2003 (13), le Conseil d'État a rappelé que le Conseil supérieur de l'audiovisuel pouvait écarter la candidature d'une association à l'exploitation d'un service de radiodiffusion sonore en catégorie A au regard de l'absence de garanties financières et de perspectives d'exploitation lui permettant d'assurer de manière constante, effective et durable la viabilité du projet dès lors qu'une part importante du financement de son projet reposait sur diverses subventions qui n'étaient garanties par aucun engagement précis figurant au dossier de candidature.
Cette décision s'inscrit dans le droit fil de la jurisprudence du Conseil d'État qui, depuis 1990, considère que l'appréciation du financement et des perspectives d'exploitation d'un service constitue un critère déterminant pour apprécier les mérites d'un projet radiophonique (14) - alors même qu'un tel motif n'est pas au nombre de ceux qui sont regardés comme des « impératifs prioritaires » par l'article 29 précité (15) - et que, sur ce fondement, le Conseil supérieur de l'audiovisuel est fondé à rejeter une candidature dont la situation financière n'offre aucune garantie quant à sa capacité d'assurer de façon durable l'exploitation effective du service (16) .
LES CARACTÉRISTIQUES TECHNIQUES
DES AUTORISATIONS
Article 25 de loi : « L'usage de la ressource radioélectrique pour la diffusion de services de communication audiovisuelle par voie hertzienne terrestre est subordonné au respect des conditions techniques définies par le Conseil supérieur de l'audiovisuel et concernant notamment : 2° le lieu d'émission ; [...] 4° la protection contre les interférences possibles avec l'usage des autres techniques de télécommunications. »
En vertu de ces dispositions, le Conseil supérieur de l'audiovisuel est compétent pour définir les caractéristiques techniques d'usage des fréquences pour l'exploitation des services de radiodiffusion sonore notamment celles relatives au lieu d'émission et à la protection contre les perturbations.
Par une décision du 30 avril 2003 (17), le Conseil d'État a jugé que le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut rejeter la demande d'un service visant à obtenir l'autorisation d'utiliser un site d'émission différent de celui accordé par la décision d'autorisation dès lors que le lieu d'émission envisagé, eu égard à sa position géographique et compte tenu de la nécessité de concilier les différents éléments techniques qui concourent à la diffusion des services de radiodiffusion sonore par voie hertzienne terrestre, risquerait d'entraîner des perturbations radioélectriques dans les émissions couvrant la zone et serait susceptible d'occasionner des brouillages affectant d'autres services autorisés dans la région.
Le contentieux relatif aux services de télévision
Le régime d'un service de télévision établi en France
et destinéà l'étranger
Au cours de l'année 2003, cette question a été posée à propos de la création d'un service diffusé par satellite et destiné à être repris par les réseaux câblés suisses, composé des programmes de M6 à la seule exception de l'insertion de messages spécifiques destinés au public suisse. L'article 33-1 de la loi du 30 septembre 1986 prévoyant que la diffusion d'un service de télévision par câble ou par satellite suppose la conclusion préalable d'une convention, sauf s'il s'agit de la reprise intégrale et simultanée d'un service diffusé par voie hertzienne terrestre, une convention spécifique a été conclue, distincte de celle conclue par la chaîne sur la base de l'article 28 de la loi précitée du 30 septembre 1986. Cette convention a été contestée par la Société suisse de radiodiffusion et télévision.
Par une décision du 21 novembre 2003 (18), le Conseil d'État s'est d'abord prononcé sur la détermination de l'État compétent en considérant qu'il résulte des stipulations de la convention européenne sur la télévision transfrontière du 5 mai 1989, à laquelle la France et la Suisse sont parties, que la transmission par satellite, vers la Suisse à partir du territoire français, du service M6 incluant des messages publicitaires spécifiques au marché suisse relevait de la compétence du Conseil supérieur de l'audiovisuel, instance compétente en France dans le domaine de l'audiovisuel.
Le Conseil d'État a ensuite confirmé que le Conseil supérieur de l'audiovisuel avait pu conclure une convention spécifique avec la société Métropole Télévision ayant pour objet de définir les obligations particulières au service diffusé par satellite vers la Suisse, en se bornant à prévoir des stipulations relatives à l'insertion des messages publicitaires spécifiquement destinés au marché suisse dès lors, qu'à l'exception de ces messages, le service consiste en la reprise intégrale et simultanée du service de programmes M6, titulaire d'une autorisation d'usage de fréquences en application de l'article 30 de la loi du 30 septembre 1986 et régi par la convention conclue le 24 juillet 2001 avec le Conseil supérieur de l'audiovisuel, en application de l'article 28 de cette loi, pour sa diffusion par voie hertzienne terrestre.
Les conditions d'autorisation
d'une chaîne
de télévision locale contrôlée
par un groupe
de presse
Par une décision du 19 février 2003 (19), le Conseil d'État s'est prononcé sur les décisions rendues par le Conseil supérieur de l'audiovisuel à l'issue de l'appel aux candidatures pour l'exploitation d'une télévision locale à Clermont-Ferrand qui l'ont conduit à retenir la candidature de la Société clermontoise de télévision, contrôlée par le groupe de presse La Montagne.
En premier lieu, la haute juridiction a confirmé la légalité du refus d'autorisation opposé à une société concurrente dont la viabilité économique du projet de télévision locale n'offrait pas de garanties suffisantes pour en assurer une exploitation durable et effective. En l'espèce, le Conseil supérieur de l'audiovisuel avait estimé que le financement et les perspectives d'exploitation du projet de la société Edepis n'offraient pas de garanties suffisantes pour permettre la mise en œuvre constante, effective et durable d'une télévision privée à caractère local en se fondant sur le caractère élevé des charges prévisionnelles, notamment le poids de la masse salariale (60 à 70 % des charges), l'engagement de produire quotidiennement un volume important d'émissions locales en première diffusion (5 heures 30) et l'absence de données tangibles venant étayer les estimations de recettes prévisionnelles.
En confirmant cette appréciation, le Conseil d'État illustre sa jurisprudence constante selon laquelle le CSA est fondé à écarter un candidat dont la situation financière n'offre aucune garantie quant à sa capacité d'assurer de façon durable l'exploitation effective du service (20).
Ensuite, le Conseil d'État s'est prononcé sur la conformité de l'autorisation de télévision locale délivrée à la Société clermontoise de télévision, laquelle dépend d'un groupe de presse dominant sur le plan local et régional, tant avec le dispositif anticoncentration sur le plan local qu'au regard des impératifs de pluralisme des courants d'expression socioculturels et de diversification des opérateurs. Après avoir considéré que le groupe La Montagne ne détenait pas plus de la moitié du capital de la SCT, conformément aux dispositions de l'article 39-III de la loi, le juge a estimé que l'autorisation de télévision locale accordée ne rend pas ledit groupe détenteur de plus de deux participations dans des médias locaux, situation que proscrit l'article 41-2, au terme d'une analyse du dispositif anticoncentration sur le plan local qui l'a conduit à se prononcer sur la notion d'audience potentielle cumulée fixée au 2° de cette disposition.
Sur ce point, le Conseil d'État considère que « le législateur a entendu déterminer l'audience potentielle d'un service de radiodiffusion sonore en rapportant le nombre de services de cette nature autorisés dans la zone » [donc tous les services de radiodiffusion sonore privés et publics] « à l'ensemble de la population recensée dans ladite zone ». Il en résulte que le calcul de l'audience potentielle cumulée d'un service de radiodiffusion sonore s'obtient en divisant l'audience potentielle de 100 % par le nombre de services de radio autorisés dans la même zone de sorte que l'audience potentielle d'un service est de 100 % dans une zone où un seul service est diffusé et de 4 % dans une zone où, comme à Clermont-Ferrand, 25 services sont diffusés. En d'autres termes, les dispositions de l'article 41-2 visent à interdire à une société qui cumule dans une zone des participations dominantes dans deux médias locaux ou régionaux de détenir plus d'une radio privée sur dix radios, publiques ou privées, dans la zone considérée.
Enfin, le Conseil d'État a confirmé que l'autorisation de télévision accordée au groupe La Montagne ne méconnaît pas les impératifs de pluralisme des courants d'expression socioculturels et de diversification des opérateurs dès lors que, si ce groupe détient des participations dans plusieurs médias locaux, le Conseil d'État considère qu'il existe sur le plan local et régional d'autres entreprises de presse, de radiodiffusion et de télévision qui offrent des supports et des programmes diversifiés.
LES MODALITÉS
DE RECONDUCTION
DE L'AUTORISATION
DE TF1
En 2003, le Conseil d'État s'est prononcé sur la légalité de la convention conclue le 31 juillet 1996 entre le CSA et la société TF1, et de la décision consécutive en date du 17 septembre 1996 aux termes de laquelle l'autorisation de cette société a été reconduite sur le fondement des dispositions de l'article 28-1 de la loi de 1986.
Par une décision du 5 mars 2003 (21), le Conseil d'État a rejeté les requêtes formées par l'Union syndicale de la production audiovisuelle, la Société civile des auteurs réalisateurs producteurs, l'association Changez la Une et Mme Turpin, dont le principal argument tendait à démontrer que l'ensemble des modifications apportées en 1996 à la convention de TF1 de 1987 en bouleversait l'économie et présentait ainsi un caractère substantiel faisant obstacle au recours à la procédure simplifiée de reconduction de l'autorisation accordée à la chaîne.
La haute juridiction a considéré que les modifications apportées à la convention initiale ne présentent pas un caractère substantiel dès lors, d'une part, que la possibilité de porter de 4 à 6 minutes la diffusion de messages publicitaires pendant l'interruption unique d'œuvres cinématographiques et des œuvres de fiction non cinématographiques ne s'accompagne pas d'un changement de la durée de la diffusion de messages publicitaires par heure d'antenne qui reste fixée à 6 minutes en moyenne quotidienne sans pouvoir dépasser 12 minutes pour une heure donnée ; d'autre part, que l'augmentation du nombre d'œuvres cinématographiques diffusées annuellement (192 au lieu de 170) reste limitée et n'est pas assortie d'une extension des jours et horaires de diffusion et que la société se soumet à des exigences nouvelles et complémentaires, notamment en matière d'éthique et de qualité des programmes, ainsi que de production audiovisuelle.
Le contentieux des décisions de sanction
Avertissement officiel du Conseil supérieur de l'audiovisuel adressé à un éditeur ou distributeur de services de radiodiffusion sonore ou de télévision qui méconnaît ses obligations légales, réglementaires ou conventionnelles, la mise en demeure prévue à l'article 42 de la loi de 1986 constitue le préalable indispensable au prononcé d'une sanction administrative, sauf dans le cas d'un retrait d'autorisation décidé sur le fondement de l'article 42-3 de la loi (22). Eu égard à son objet et en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires expresses, la mise en demeure n'est soumise à aucune procédure préalable (23). En outre, les exigences propres au respect des droits de la défense ne s'imposent pas à son égard dans la mesure où la mise en demeure n'a pas le caractère d'une accusation en matière pénale au sens de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.
Confirmant que la mise en demeure n'a pas à être précédée d'une procédure contradictoire, y compris pour des manquements à des obligations conventionnelles, le Conseil d'État a, par une décision du 21 novembre 2003 (24), confirmé la légalité d'une décision mettant une société exploitant un service de radiodiffusion sonore en demeure de respecter les stipulations de sa convention prévoyant la fourniture d'un rapport sur les conditions d'exécution de ses obligations ainsi que des comptes de bilan et de résultat du dernier exercice clos accompagné de la déclaration annuelle des données sociales. À cette occasion, la haute juridiction a relevé que la société n'avait pas produit la totalité des documents demandés, dès lors qu'en réponse à la demande précise formulée par le comité technique radiophonique portant notamment sur la fourniture d'un rapport d'activité contenant des éléments détaillés et la déclaration annuelle des données sociales, l'opérateur s'était borné à produire une fiche de renseignements juridiques, les comptes de bilan et de résultats pour l'exercice 2000, un récapitulatif cumulé des données sociales et des articles de presse.
Si la mise en demeure n'a pas à être précédée d'une procédure préalable, le respect des droits de la défense s'impose en revanche avant le prononcé d'une mesure de suspension temporaire de l'autorisation d'exploiter un service en cas de manquements successifs d'un titulaire d'autorisation qui a déjà fait l'objet d'une mise en demeure et d'une suspension de son autorisation. Le Conseil d'État dégage cette solution dans une décision du 7 février 2003 (25) à propos de la décision du Conseil supérieur de l'audiovisuel de suspendre d'office pour une durée de 30 jours l'autorisation d'un service de radiodiffusion sonore qui, passant outre son obligation de diffuser un programme d'intérêt local, avait déjà fait l'objet d'une mise en demeure puis d'une première suspension de son autorisation pendant une durée de 30 jours. En l'espèce, le Conseil d'État rappelle que le respect des droits de la défense est inhérent à toute sanction et que, si la mise en demeure n'a pas à être réitérée dès lors que le grief est le même, le titulaire de l'autorisation doit être mis en mesure de présenter sa défense une nouvelle fois avant le prononcé d'une nouvelle sanction.
Ce faisant, le juge confirme que les sanctions prononcées par les autorités administratives indépendantes constituent des accusations en matière pénale au sens de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et que leur prononcé doit être entouré de toutes les garanties propres au procès équitable, dont celle du respect des droits de la défense.
En revanche, les dispositions des articles 42 et 42-1 de la loi de 1986 ne permettent pas au Conseil supérieur de l'audiovisuel de faire usage de son pouvoir de sanction à l'encontre d'une société qui n'était pas titulaire d'une autorisation d'émettre. En effet, par une décision du 19 mars 2003 (26), le Conseil d'État a rejeté la requête présentée par la société Métropole Télévision (M6) lui demandant, d'une part, d'annuler la décision du 11 décembre 1998 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel avait rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit mis fin à la situation illicite résultant de l'exploitation par la société TMC de sites et de fréquences non autorisés, d'autre part, d'enjoindre au Conseil supérieur de l'audiovisuel de faire cesser les émissions irrégulières de TMC.
Ce faisant, le Conseil d'État confirme la décision implicite par laquelle le CSA a refusé de mettre en œuvre le pouvoir de sanction administrative qu'il tient des articles 42 et 42-1 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée à l'encontre de la société TMC, après l'expiration de l'autorisation d'émettre de 10 ans prévue par un accord entre le gouvernement français et la société spéciale d'entreprise TMC, dès lors que celle-ci n'était pas titulaire d'une autorisation sur le fondement de la loi du 30 septembre 1986 modifiée. Le juge considère également que le CSA n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en s'abstenant de mettre en œuvre les dispositions des articles 42-10 (saisine du président de la section du contentieux du Conseil d'État) et 42-11 (saisine du procureur de la République par le CSA) de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, et de l'article 40 du code de procédure pénale (saisine du procureur de la République par toute autorité constituée) eu égard à l'existence de négociations, à la date de sa décision, entre la principauté de Monaco et la France en vue de la conclusion d'un accord relatif à la diffusion de TMC qui faisait suite à un précédent accord intergouvernemental non ratifié ayant le même objet et dont la signature était intervenue le 8 avril 1995.
Il est à noter que, depuis lors, la loi n° 2003-207 du 12 mars 2003, publiée au Journal officiel du 13 mars 2003, a autorisé l'approbation de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de Son Altesse Sérénissime le Prince de Monaco conclu le 15 mars 2002 relatif à l'attribution et à l'utilisation par la société Télé Monte-Carlo de fréquences hertziennes terrestres pour la diffusion de son programme à partir d'installations d'émission implantées en territoire français.
Le contentieux de la télévision numérique terrestre
La perspective du développement de la télévision numérique terrestre a amené le Conseil supérieur de l'audiovisuel à décider le réaménagement des fréquences radioélectriques, certaines d'entre elles - affectées jusqu'alors à une diffusion analogique - pouvant être réaffectées à une diffusion en mode numérique, d'autres devant être substituées aux précédentes tout en conservant une qualité de réception analogique équivalente. Par des décisions du 30 avril 2002, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a substitué 17 nouvelles fréquences à celles qu'utilisaient déjà les principaux opérateurs dans certaines zones géographiques déterminées. Au terme du délai de neuf mois laissé aux opérateurs pour procéder à ces réaménagements, le refus de TF1 et de M6 de s'exécuter a donné lieu à un double contentieux.
Pour vaincre leur opposition, le CSA a d'abord saisi en référé le président de la section du contentieux du Conseil d'État en lui demandant de contraindre TF1 et M6 à procéder aux réaménagements de fréquences analogiques nécessaires au lancement de la télévision numérique terrestre, en se fondant sur les dispositions de l'article 42-10 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, procédure exceptionnelle mise en œuvre à deux reprises par la CNCL et tombée en désuétude depuis 1994. De son côté, la société TF1 a contesté le pouvoir du CSA de modifier unilatéralement les fréquences en demandant l'annulation de la décision du 20 novembre 2001 reconduisant son autorisation en tant qu'elle mentionne la possibilité pour le CSA, si le développement des réseaux de télévision l'exige, de substituer aux fréquences accordées d'autres fréquences de réception équivalente. Dans ces deux procédures, le Conseil d'État a donné raison au CSA en suivant le même raisonnement.
Par deux ordonnances du 27 mars 2003 (27), le juge des référés, se fondant sur les articles 21, 22 et 25 de loi de 1986, a rappelé que les fréquences radioélectriques relèvent du domaine public et que le Conseil supérieur de l'audiovisuel est compétent pour délivrer, par des décisions unilatérales, des autorisations d'usage de ces fréquences, assortir ce droit d'usage d'obligations appropriées et, le cas échéant, modifier les conditions d'exercice de ce droit à tout moment, sous le contrôle du juge administratif. Constatant ensuite que l'inexécution volontaire des décisions du CSA par les deux opérateurs était constitutives d'un manquement justifiant la mise en œuvre de la procédure de l'article 42-10 de la loi de 1986, le juge des référés a enjoint aux sociétés TF1 et M6 de prendre toutes dispositions pour cesser d'émettre sur les anciennes fréquences et, sans interruption de service, commencer à émettre sur les nouvelles fréquences et ce, dans un délai impératif d'un mois dont tout dépassement donnera lieu à une astreinte de 30 000 € par jour de retard pour TF1 et 15 000 € par jour de retard pour M6.
Sur le fond, le Conseil d'État écarte les deux requêtes de la société TF1 en jugeant que : « le Conseil supérieur de l'audiovisuel est chargé, en vertu de l'article 22 de la loi du 30 septembre 1986, de veiller à la meilleure utilisation possible des fréquences radioélectriques disponibles en vue notamment du développement de la télévision numérique terrestre » et « qu'il lui appartient de procéder à cette fin aux réaménagements de fréquences nécessaires par des décisions unilatérales » (28).
Les changements de fréquences ayant été opérés dans le délai imparti, le juge des référés a estimé, par deux ordonnances du 3 juillet 2003 (29), qu'il n'y avait pas lieu de liquider les astreintes prononcées à l'encontre des sociétés TF1 et Métropole Télévision (M6).
Le contentieux relatif au contrôle des programmes
l'interruption
publicitaire
d'une œuvre
cinématographique
L'article 73 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée prévoit que la diffusion d'une œuvre cinématographique ou audiovisuelle ne peut comprendre qu'une seule interruption publicitaire, sauf dérogation accordée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel. En raison de l'exceptionnelle durée du film Titanic, la société TF1 avait obtenu du Conseil supérieur de l'audiovisuel l'autorisation de pratiquer une seconde interruption publicitaire de la diffusion de cette œuvre aux termes d'une lettre qui indiquait en outre que le CSA ne voyait pas d'objection à la diffusion du film en deux parties lors de deux soirées successives. Les sociétés d'auteurs interprétant cette lettre comme accordant à la société TF1 l'autorisation de diffuser le film en deux parties ont saisi le juge administratif d'une demande d'annulation de la décision résultant de cette lettre.
Par une décision du 12 mai 2003 (30), le Conseil d'État a rejeté le recours sur le terrain de la recevabilité en estimant que la lettre du CSA ne constituait pas une décision susceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir. Le juge précise qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne soumet à l'autorisation préalable du Conseil supérieur de l'audiovisuel la diffusion en plusieurs parties d'une œuvre cinématographique par un service de communication audiovisuelle. L'article 73 de la loi limite seulement le nombre d'interruptions publicitaires dont peut faire l'objet la diffusion d'une œuvre cinématographique ou audiovisuelle, quelles qu'en soient les modalités, à une seule interruption, le conseil supérieur de l'audiovisuel pouvant toutefois, à titre dérogatoire et en raison notamment de la longue durée de l'œuvre, autoriser une ou plusieurs interruptions supplémentaires.
Ce faisant, le Conseil d'État distingue le régime de l'interruption publicitaire unique lors de la diffusion de l'œuvre, sauf dérogation accordée par le CSA, qui tend à protéger le public contre les coupures publicitaires intempestives et le régime de protection de l'intégrité d'une œuvre qui relève du droit moral des auteurs et artistes-interprètes et auxquels le diffuseur peut solliciter un accord en vue de la diffusion d'une œuvre cinématographique en plusieurs parties.
la qualification
d'œuvre audiovisuelle de l'émission Popstars
La Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) et plusieurs organismes défendant des intérêts artistiques et culturels avaient saisi en décembre 2001 le Conseil d'État en lui demandant d'annuler la décision par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel avait qualifié l'émission Popstars d'œuvre audiovisuelle au sens de l'article 4 du décret du 17 janvier 1990, et faisait valoir qu'elle relevait plutôt tout à la fois d'un jeu télévisé, d'une émission de variétés et d'une bande d'autopromotion au sens du décret précité.
Par une décision du 30 juillet 2003 (31), le Conseil d'État a confirmé la décision du CSA et rejeté la requête. Tout en admettant que la qualité d'œuvre audiovisuelle s'apprécie au regard de l'objet principal d'une émission, le juge administratif a considéré que l'objet principal de Popstars ne relevait pas de l'un ou de plusieurs des genres mentionnés à l'article 4 du décret précité.
La haute juridiction a en effet jugé que l'émission « a pour principal objet de présenter au public l'entraînement, la formation et la progression, dans le domaine de la chanson, des personnes sélectionnées et de décrire un début de carrière effective au sein des métiers du spectacle », objet qui ne se rattache à aucun genre mentionné à l'article 4 du décret. En outre, il constate que Popstars « comporte des éléments de scénario, une mise en scène et un montage », éléments de création propres à lui conférer la qualité d'œuvre audiovisuelle.
Le Conseil d'État a relevé que l'émission comportait certes des éléments de jeu et de variétés, mais que ceux-ci ne présentaient qu'un caractère accessoire et n'étaient pas de nature à faire regarder Popstars comme relevant principalement des genres du jeu et des variétés. Quant à l'autopromotion, le juge l'écarte, l'émission ne constituant pas un ensemble d'annonces dont l'objet serait de promouvoir la chaîne de télévision qui les diffuse.
Par cette décision, source de multiples contestations de la part des auteurs et producteurs, le Conseil d'État précise l'interprétation qu'il convient de faire de l'article 4 du décret du 17 janvier 1990 modifié en considérant qu'une émission dont l'objet principal ne relève pas de l'un ou de plusieurs des genres mentionnés dans cet article, même si elle peut comporter, à titre accessoire, des éléments empruntant à l'un ou à plusieurs de ces genres, doit être qualifiée d'œuvre audiovisuelle.
LA PUBLICITÉ CLANDESTINE
Au cours de l'émission Nulle part ailleurs diffusée sur Canal+ le 26 novembre 1999, le Conseil avait estimé qu'une séquence consacrée à la présentation du jeu vidéo « Tomb Raider » avait un caractère publicitaire, en violation des dispositions de l'article 9 du décret du 27 mars 1992 interdisant la publicité clandestine, justifiant le prononcé d'une mise en demeure de respecter la réglementation publicitaire.
Par une décision du 19 mars 2003 (32), le Conseil d'État a confirmé l'appréciation du CSA en considérant que la séquence incriminée, au cours de laquelle l'animateur a reçu une comédienne (Lara Croft) censée représenter le personnage d'un jeu vidéo (Tom Raider) lors de son lancement sur le marché, avait le caractère d'une publicité clandestine interdite par les dispositions de l'article 9 du décret précité - rendues applicables à la société Canal+ par l'article 4 du décret n° 95-668 du 9 mai 1995 - en raison des modalités de la présentation du produit caractérisées par la mise en images et la description systématiquement flatteuse de ce jeu, la fréquence de la citation du produit et l'argumentaire développé par la comédienne employée par l'éditeur du jeu pour en faire la promotion commerciale.
Cette décision est conforme à la jurisprudence du Conseil d'État qui avait déjà jugé que « la mise en image et la présentation systématiquement flatteuse » d'un véhicule par l'animateur d'une émission constitue une infraction à l'interdiction de toute publicité clandestine (33).
Le sort des autres contentieux
SAISINE EN RÉFÉRÉ DU CONSEIL D'ÉTAT
La procédure du référé administratif, instituée par la réforme du 30 juin 2000 et entrée en vigueur le 1er janvier 2001, a été utilisée sans succès par l'association Zaléa TV qui, se fondant sur les dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, instituant la procédure du référé-liberté, a demandé au juge des référés du Conseil d'État de suspendre la décision par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel avait rejeté sa candidature à l'édition d'un service de télévision numérique terrestre en soutenant que cette décision portait une atteinte grave et illégale à la liberté de la communication audiovisuelle et mettait en cause son avenir sur le plan économique.
Par une ordonnance du 1er juillet 2003 (34), le juge des référés a d'abord relevé que la décision dont la suspension était demandée était fondée sur des considérations tenant à l'absence de grille de programmation, au caractère incertain du plan d'affaires et au fait qu'en l'absence de plan de financement, la viabilité économique et financière du projet n'était pas assurée et que ces motifs étaient au nombre de ceux que le Conseil supérieur de l'audiovisuel pouvait retenir en application de la loi du 30septembre 1986. En conséquence, il a rejeté la requête comme manifestement mal fondée, selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative, en considérant que l'argumentation développée par l'association sur le bien-fondé de la décision de refus d'autorisation n'était pas de nature à établir qu'une atteinte manifestement illégale ait été portée à une liberté fondamentale.
DIFFÉRENTES CAUSES D'IRRECEVABILITÉ
En 2003, le Conseil d'État a également rejeté des requêtes pour cause d'irrecevabilité tenant au défaut de qualité pour agir d'un requérant, mais surtout en raison du caractère non décisoire des actes attaqués, notamment lors des procédures d'autorisation et de reconduction. En outre, le Conseil d'État s'est prononcé sur une mesure d'information délivrée à un opérateur à propos du respect du dispositif anti-concentration d'un groupe concurrent.
Avant d'examiner ces décisions, notons qu'un désistement d'office a été prononcé, sur le fondement de l'article R.122-12 du code de justice administrative, à l'encontre de requérants qui n'avaient pas produit le mémoire complémentaire annoncé par leur requête introductive d'instance dans le délai réglementaire de quatre mois prévu à l'article R.611-22 du même code (35).
En ce qui concerne le rejet pour défaut de qualité pour agir, le Conseil d'État, par une décision du 28 novembre 2003 (36), a rejeté, pour ce motif, la requête de l'association Collectif égalité qui demandait l'annulation de la décision implicite par laquelle plusieurs autorités administratives, dont le CSA, avaient rejeté sa demande tendant à obtenir le prononcé de mesures pour que cesse la discrimination dont seraient victimes les membres de la communauté noire de France dans les émissions des chaînes de télévision et de radiodiffusion, et pour accéder aux professions médiatiques. Le juge relève qu'après l'avoir invitée à régulariser sa requête, l'association s'est abstenue de produire devant le Conseil d'État ses statuts ainsi que le mandat qu'elle aurait donné à l'avocat signataire du recours présenté en son nom.
S'agissant des causes d'irrecevabilité, elles tiennent notamment à la procédure d'appel aux candidatures en vue de la délivrance des autorisations d'exploitation des services de radiodiffusion sonore ou de télévision qui constitue, aux termes de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, une opération complexe formée de plusieurs étapes successives et marquée par l'édiction d'actes intermédiaires ayant le caractère de mesures préparatoires aux décisions finales d'autorisation et de rejet. Ces actes n'ont pas de caractère décisoire c'est-à-dire qu'ils ne confèrent pas ou ne refusent pas de droits ni même d'obligations et ne peuvent, en conséquence, être déférés au juge de l'excès de pouvoir.
Pour les mêmes considérations, les irrecevabilités concernent la procédure de reconduction des autorisations qui, aux termes des dispositions de l'article 28-1 de la loi du 30 septembre 1986, comprend également plusieurs étapes successives, enfermées dans des délais légaux particulièrement contraignants, formant ensemble une opération complexe. L'autorité de régulation doit d'abord se prononcer sur la possibilité de renouveler hors appel aux candidatures l'autorisation en cours puis, si le principe de la reconduction simplifiée a été admis, engager ensuite des négociations avec l'opérateur en vue de la conclusion d'une nouvelle convention dont le défaut fait obstacle à la reconduction hors appel aux candidatures de l'autorisation. Les décisions intermédiaires prises par l'instance de régulation au cours de cette procédure constituent également de simples mesures préparatoires.
Plusieurs décisions rendues par le Conseil d'État au cours de l'année 2003 illustrent la nature juridique de ces décisions qui ne sont pas des actes susceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.
Par une décision du 19 mars 2003 (37), le Conseil d'État s'est prononcé sur la décision d'appel aux candidatures du 24 juillet 2001 pour l'exploitation de la télévision numérique terrestre à la demande de l'Association française des opérateurs de réseaux multiservices (AFORM). Conformément à sa jurisprudence constante sur la nature d'acte préparatoire de la décision d'appel aux candidatures, que ce soit pour un service de télévision (38) ou pour un service de radiodiffusion sonore (39), la haute juridiction a déclaré irrecevable la requête.
Pour le même motif d'irrecevabilité, le Conseil d'État a confirmé, par une décision du 17 décembre 2003 (40), que la décision par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel arrête la liste des candidats présélectionnés dans le cadre d'un appel aux candidatures constitue une mesure préparatoire aux décisions d'attribution de fréquences, qu'une telle liste ne peut être regardée comme ayant valeur d'autorisation pour les candidats qui y figurent ni de rejet pour les candidats qui n'y figurent pas et que cette décision n'a donc pas le caractère d'un acte faisant grief. Cette solution est conforme à la jurisprudence constante en la matière rappelée en 2002(41).
Enfin, par une décision du 19 mars 2003 (42), le Conseil d'État a rejeté la requête de la société Canal Antilles demandant l'annulation de la décision par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel avait approuvé le projet de convention établi dans le cadre de la procédure de reconduction de son autorisation sur le fondement de l'article 28-1 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, en ce qu'elle prévoit une interdiction totale de diffusion de programmes de catégorie V (œuvres cinématographiques interdites aux mineurs de 18 ans et programmes pornographiques ou de très grande violence réservés à un public adulte averti et susceptibles de nuire à l'épanouissement physique, mental ou moral de ces mineurs).
Après avoir rappelé que la société Canal Antilles avait signé le 7 août 2002 une convention dont les termes avaient été adoptés par une décision du 24 juillet 2002, le juge a confirmé que cette décision approuvant un projet de convention constitue un acte préparatoire ne pouvant faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Ce faisant, le juge n'a fait qu'appliquer à l'espèce une solution déjà jugée sur le caractère préparatoire des actes intermédiaires intervenant dans le cours de la négociation comme le rappel de son cadre(43). Tirant les conséquences de cette décision, la société Canal Antilles a attaqué depuis lors, par une requête actuellement en cours d'instruction devant le Conseil d'État, la convention qu'elle avait signée en ne contestant que la stipulation interdisant la diffusion de programmes de catégorie V.
Sur ce même terrain, le Conseil d'État, par une décision du 5 mars 2003 (44), a débouté la société NRJ de sa demande d'annulation de la décision par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel avait admis que, pour le calcul de la population couverte par les radios du groupe Europe 1 Communication, au regard du seuil de concentration prévu par les dispositions de l'article 41 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, les radios diffusant, pour une part majoritaire de leur temps d'antenne, le programme AFP Audio produit par une filiale de ce groupe, n'avaient pas à être prises en compte. Le juge a estimé que la requête était dirigée contre une décision ne faisant pas grief, dès lors qu'aux termes de la lettre adressée au groupe Europe 1 Communication, le Conseil supérieur de l'audiovisuel s'était borné, dans le cadre d'un échange de correspondance, à informer le groupe Europe 1 Communication sur sa situation au regard de la loi sans prendre aucune décision.
« IMMEUBLES BROUILLEURS »
Enfin, dans le domaine des immeubles dits « brouilleurs » pour lesquels l'article L. 112-12 du code de la construction et de l'habitation prévoit les conditions dans lesquelles peut être assurée, sous le contrôle du CSA, la résorption des zones d'ombre « artificielles » créées par l'édification de constructions gênant la réception de la télévision ou de la radio, il convient de souligner que l'article considéré n'est applicable qu'aux seules constructions ayant fait l'objet d'un permis de construire.
Par une ordonnance du 9 avril 2003, le président du tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer a en effet débouté le CSA d'une demande en référé visant à ce que la société Les Carrières de la Vallée heureuse, propriétaire d'un terril à Ferques (62), soit condamnée à réaliser, à ses frais, et sous le contrôle du Conseil, les installations propres à rétablir des conditions de réception de la télévision satisfaisantes dans la zone d'ombre au voisinage dudit terril.
Un tel cas de figure ne relevant pas, aux yeux du tribunal, des dispositions de l'article L. 112-12 du code précité, disposition particulière devant être interprétée strictement dès lors qu'il ne s'agit pas d'une construction soumise au régime du permis de construire, le seul recours restant aux riverains est celui d'engager une action pour trouble anormal de voisinage à l'encontre de la société propriétaire du terril brouilleur.
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(1) Les cinq catégories de services définies par le Conseil supérieur de l'audiovisuel sont :
- catégorie A - services associatifs éligibles au fonds de soutien à l'expression radiophonique ;
- catégorie B - services locaux indépendants ne diffusant pas de programme national identifié ;
- catégorie C - services locaux diffusant le programme d'un réseau thématique à vocation nationale ;
- catégorie D - services thématiques à vocation nationale ;
- catégorie E - services généralistes à vocation nationale.
(2) CE 18 février 1994 Société Performances SA RFM et autres, Rec. p. 91.
CE 27 juin 1997 Société NRJ, Rec. p. 268.
CE 11 mars 2002 Société Europe 1 Communication, Req. n° 222 219 et 224 867.
(3) CE 2 juin 1993 Congrégation audiovisuelle des associations, Req. n° 243 371.
(4) CE 27 juin 1997 SARL CIRTES, Rec. tables p. 1056.
(5) CE 27 mars 2000 Société d'exploitation de Radio Finance, Req. n° 198 349.
CE 14 juin 2002 Société Vortex, Req. n° 213 282 et 213 283.
(6) CE 21 novembre 2003 Société Vortex, Req. n° 244 172.
(7) CE 30 décembre 2003 Société « Nord Aquitaine Radio », Req. n° 241 877.
(8) CE 30 décembre 2003 Société Vortex, Req. n° 241 875.
(9) CE 23 septembre 1998 Association Ephrata, Rec. p. 337.
CE 17 octobre 1997 Société Belenos Alsace, Rec. p. 369.
(10) CE Sect. 13 décembre 2002 Société Radio Monte-Carlo, Req. n° 221 827 (annulation).
(11) CE 15 janvier 2003 Société Radio Monte-Carlo, Req. n° 221 828, 221 829 et 221 830 (annulation).
(12) CE 19 avril 2000 Société Canalþ9, Req. n° 198 938.
CE 10 octobre 2001 Société Nova, Req. n° 213 485.
(13) CE 21 novembre 2003 Association Radio Delta, Req. n° 242 083.
(14) CE 5 octobre 1990, Association « Comité de secours aux nécessiteux », Req. n° 100 310.
(15) CE 21 juin 1996 Société Radio Magick International, Rec. tables p. 1147.
(16) CE 28 septembre 1994 SARL Contact distribution et autres, Rec. tables p. 1169.
CE 24 mai 1996 Association Radio communication musique, Req. n° 150 882.
CE 10 juillet 1996 Association Union musulmane de solidarité française, Req. n° 157 747.
(17) CE 30 avril 2003 Association Culture Expression Locales Limersheim, Req. n° 242 865.
CE 21 novembre 2003 Association Culture Expression Locales Limersheim, Req. n° 248 261.
(18) CE 21 novembre 2003 Société suisse de radiodiffusion et télévision, Req. n° 239 898.
(19) CE 19 février 2003 Société Edepis, Req. n° 223 988 et n° 223 989.
(20) CE 28 septembre 1994 SARL Contact distribution et autres, Rec. tables p. 1169.
(21) CE 5 mars 2003 Union syndicale des producteurs audiovisuels, Req. n° 182707-182708-182709, n° 184121-184122-181123.
(22) CE Ass. 11 mars 1994 Société La Cinq, Rec. p. 117.
(23) CE 30 décembre 2002 Société Vortex, Req. n° 236 826, mentionnée aux tables
(24) CE 21 novembre 2003 Société Canal 9, Req. n° 249 376.
(25) CE 7 février 2003 Association Radio deux couleurs, Req. n° 232 840, mentionnée aux tables.
(26) CE 19 mars 2003 Société Métropole Télévision M6, Req. n° 204 515.
(27) CE Réf. 27 mars 2003 Conseil supérieur de l'audiovisuel, Req. n° 254 736 et 257 737, publiée au recueil (AJDA 2003 p. 1454, note J.-P. THIELLAY).
(28) CE 12 mai 2003 Société Télévision Française 1, Req. n° 247 353 et 248 337, publiée au recueil.
(29) CE Réf. 3 juillet 2003 Conseil supérieur de l'audiovisuel, Req. n° 254 736 et 257 737.
(30) CE 12 mai 2003 Société civile des auteurs, réalisateurs, producteurs (ARP) et autres, Req n° 240 085, 241 917 et 241 918, mentionnée aux tables.
(31) CE 30 juillet 2003 Société des auteurs et compositeurs dramatiques et autres, Req. n° 241 520, publiée au recueil
(32) CE 19 mars 2003 Société Canal Plus, Req. n° 234 487.
(33) CE 18 mai 1998 Société métropole télévision, tables p. 1154.
(34) CE Ref. 1er juillet 2003 Association Zaléa TV, Req. n° 258 105.
(35) CE ord. 19 décembre 2003 Association française des opérateurs de réseaux multiservices et autres, Req. n° 260 935.
(36) CE 28 novembre 2003 Association Collectif égalité, Req. n° 253 762.
(37) CE 19 mars 2003 Association française des opérateurs de réseaux multiservices, Req. n° 237 513 et 260 935, mentionnée aux tables.
(38) CE Ass. 21 octobre 1988 SA Télévision française 1, Rec. p. 36.
(39) CE 13 février 1991 Société Ile de France Média, Rec. p. 58.
(40) CE 17 décembre 2003 SARL SOPRODI Radios régions, Req. n° 247 948.
(41) CE 29 juillet 2002 Association Oxygène, Req. n° 233 033 et 233 034, mentionnée aux tables.
CE 29 juillet 2002 Société Édepis, Req. n° 211 689.
(42) CE 19 mars 2003 Société Canal Antilles, Req. n° 249 413, publiée au recueil.
(43) CE 12 novembre 1997 Société NRJ, Rec. tables p. 1057.
(44) CE 5 mars 2003 Société NRJ, Req. n° 236 828.
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