Introduction
Les chiffres clés du CSA en 2004
Les dates clés de l'année 2004
Les événements marquants de l'activité du Conseil en 2004
La gestion des fréquences
Les autorisations et les conventions
Le contrôle des programmes
L'activité contentieuse
Les avis
Les nominations
Les études et la communication
Les relations internationales
Le Conseil
   

Les membres du Conseil et leurs domaines d'activité
Les avis
Les décisions
Les recommandations
Les communiqués

 

 

 

 

 

V - L'activité contentieuse


     > Le contentieux de la délivrance des autorisations d'usage
        de fréquences

        La procédure d'octroi des autorisations
        La mise en œuvre des critères de sélection
     > Le contentieux de la reconduction des autorisations
        Sur la non-reconduction d'une autorisation d'un service de radio qui ne
        remplit plus les critères propres à sa catégorie d'autorisation

        Sur la négociation d'une nouvelle convention d'une chaîne de télévision et
        la possibilité pour le CSA de s'opposer à la diffusion de programmes
        susceptibles de nuire aux mineurs

     > Le contentieux des sanctions
     > Le contentieux du conventionnement des chaînes du câble et
        du satellite

     > Le contentieux relatif au pouvoir de recommandation
     > L'application du dispositif anticoncentration à la télévision
        numérique terrestre

     > Le contentieux des chaînes satellitaires non conventionnées
    

À l'instar des années précédentes, les décisions rendues par le Conseil d'État au cours de l'année 2004 sur les requêtes dirigées contre les délibérations du Conseil supérieur de l'audiovisuel ont principalement concerné les procédures de mise en concurrence organisées pour l'attribution des autorisations des services de radio. Certaines de ces décisions ont conduit le Conseil d'État à préciser tant la procédure que les critères de sélection des projets en lice. Les domaines de la reconduction des autorisations et des sanctions ont également conduit le Conseil d'État à éclairer le Conseil supérieur de l'audiovisuel sur leur mise en œuvre.

Les autres contentieux marquants ont porté sur le refus de conventionnement d'une chaîne diffusée sur le câble et le satellite susceptible de porter atteinte à l'ordre public, la mise en œuvre du pouvoir de recommandation, l'application du dispositif anti-concentration à la télévision numérique terrestre et le recours à la procédure du référé-audiovisuel à l'égard d'une chaîne extra-européenne non conventionnée et diffusant des programmes incompatibles avec les principes encadrant la liberté de communication audiovisuelle en France.

Il est à noter que les dispositions de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, citées ci-après, font référence à leur rédaction antérieure aux lois modificatives n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique publiée au Journal officiel du 22 juin 2004 et n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle publiée au Journal officiel du 10 juillet 2004.

Le contentieux de la délivrance des autorisations d'usage de fréquences

LA PROCÉDURE D'OCTROI DES AUTORISATIONS

L'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée donne compétence au Conseil supérieur de l'audiovisuel pour attribuer les autorisations d'usage de fréquences dans le cadre d'une opération complexe qui comprend plusieurs étapes, dont l'établissement de la liste des fréquences pouvant être attribuées, et le conduit à départager les candidatures pour chaque zone géographique ouverte à la sélection.

En 2004, le Conseil d'État s'est prononcé sur la portée des dispositions du 7e alinéa dudit article 29 selon lesquelles les candidats recevables font connaître au CSA la ou les fréquences qu'ils souhaitent utiliser après la publication du plan de fréquences. Le Conseil d'État a considéré que les candidats déclarés recevables dans les zones ouvertes à l'appel ont l'obligation de confirmer leur candidature dans les zones initialement demandées en choisissant au moins une fréquence dans chacune d'elles.

Le Conseil d'État a confirmé que l'absence de réponse s'analyse comme un désistement ou une renonciation implicite des candidats à leur demande initiale et le CSA, n'étant plus saisi de cette demande, n'est pas tenu d'y apporter une réponse expresse (CE 11 février 2004 Société Canal 9 , Req. n° 252371, à mentionner aux tables du Recueil).

Sur le terrain de la procédure de sélection des candidats, le Conseil d'État a également confirmé que le Conseil supérieur de l'audiovisuel pouvait, notamment lorsque les projets présentés pour une même zone à la suite d'un même appel de candidatures sont nombreux, procéder à leur examen au cours de plusieurs séances successives mais, qu'afin d'être en mesure d'apprécier, au regard notamment des critères mentionnés aux 8e et 9e alinéas de l'article 29 précité, l'intérêt respectif des projets qui lui sont présentés, le Conseil devait statuer sur l'ensemble des candidatures dont il est saisi et décider, pour une même zone, de leur acceptation ou de leur rejet, au cours d'une même séance (CE 12 mai 2004 Société Cascadia , Req. n° 257 034).

LA MISE EN ŒUVRE DES CRITÈRES DE SÉLECTION

La sélection des candidats à l'autorisation s'opère au regard de trois séries de critères d'inégale importance fixés par les dispositions du 8e alinéa de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée. Au nombre des impératifs prioritaires à l'aune desquels le Conseil supérieur de l'audiovisuel apprécie l'intérêt de chaque projet pour le public figurent la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socioculturels et la diversification des opérateurs. Le CSA tient également compte de critères de second rang tels que le financement et les perspectives d'exploitation du service et, enfin, veille notamment au juste équilibre entre les réseaux nationaux de radio et les autres services.

L'application des critères prioritaires du pluralisme des courants d'expression socioculturels et de la diversification des opérateurs

L'impératif prioritaire de pluralisme des courants d'expression socioculturels fonde le CSA à retenir la candidature dont les programmes sont susceptibles de répondre aux attentes du plus large public dans la zone ou dont le format est inédit dans celle-ci. La diversification des opérateurs suppose, lorsque deux candidats de la même catégorie sont en concurrence pour l'attribution d'une fréquence dans une zone déterminée, que le CSA tienne compte du nombre de fréquences déjà attribuées à chacun d'entre eux lors de l'appel en cours ainsi que lors des appels aux candidatures antérieurs (CE 23 juin 2000 Société VORTEX , Rec. p.108).

Par une décision du 11 février 2004 (CE 11 février 2004 Société VORTEX , Req. n° 252370), le Conseil d'État a confirmé que le critère du pluralisme des courants d'expression socioculturels justifie de retenir la candidature d'une seconde radio généraliste dans une zone dès lors que son programme répond mieux aux attentes d'un large public plutôt que celle d'une radio musicale supplémentaire dans la mesure où cinq radios musicales sont déjà proposées dans la zone. Il a également jugé que l'objectif de diversification des opérateurs permet de départager les candidatures de deux radios musicales dans la même catégorie et de retenir la candidature de celle qui ne dispose d'aucune autorisation dans la région par préférence à celle dont le programme est déjà diffusé dans sept zones de cette région. La Haute Assemblée a enfin considéré que l'objectif de diversité des programmes et des formats qui se rattache au critère du pluralisme des courants d'expression socioculturels, justifie le choix d'une radio généraliste absente de la zone par préférence à une radio majoritairement musicale et le choix d'un programme inédit par rapport à un format déjà présent dans la zone.

Le critère secondaire du financement et des perspectives d'exploitation

Bien que complémentaire, le critère du financement et des perspectives d'exploitation s'avère souvent déterminant pour apprécier la solidité d'une candidature et son appréciation suppose que le demandeur présente un dossier complet contenant toutes les informations prévues au 4e alinéa de l'article 29 de la loi notamment les éléments relatifs aux modalités de financement et aux perspectives d'exploitation du service.

En 2004, le Conseil d'État a confirmé à plusieurs reprises que le CSA est fondé à rejeter une candidature dont la situation financière n'offre aucune garantie quant à sa capacité d'assurer de façon durable l'exploitation effective d'un service (CE 28 septembre 1994 SARL Contact distribution et autres , Rec. tables p. 1169), que ce soit un projet ou l'extension d'un service existant. Il a notamment jugé que le CSA peut rejeter sur ce fondement une candidature pour l'exploitation d'un service qui produit, à l'appui de sa demande, un budget prévisionnel succinct et incomplet (CE 7 mai 2004 Association Pascal Bréart Communication , Req. n° 254 184) ou dont la situation financière, eu égard à ses recettes prévisionnelles, n'offre pas de garanties suffisantes (CE 19 mai 2004 Association La Jeune Voix , Req. 253 718).

Le Conseil d'État a également confirmé le rejet, sur ce fondement, de demandes d'extension d'un service déjà autorisé dont les états financiers révélaient une exploitation structurellement déficitaire et qui n'avait produit, dans son dossier de candidature, ni compte prévisionnel ni état prévisionnel détaillant l'origine et le montant des financements dont elle serait susceptible de bénéficier, en particulier du soutien financier du groupe auquel ce service appartient (CE 11 février 2004 Société Canal 9 , Req. n° 252 371). Par plusieurs décisions postérieures relatives à ce même service, le Conseil d'État a confirmé que la viabilité économique d'un projet radiophonique doit être démontrée et ne peut résulter implicitement de l'adossement du candidat à un groupe financièrement solide (CE 20 février 2004 Société Canal 9 , Req. n° 248 781 ; même date , Req. n° 249 548; CE 28 mai 2004 Société Canal 9 , Req. n° 254 056 ; même date , Req. n° 254 369).

La mise en œuvre des critères de sélection doit respecter un juste équilibre entre les services

Les trois derniers alinéas de l'article 29 de la loi précitée prescrivent au Conseil supérieur de l'audiovisuel, lorsqu'il délivre les autorisations d'usage de fréquences, de veiller à la préservation d'équilibres globaux entre les différents types de services notamment le juste équilibre entre les réseaux nationaux de radio et les services locaux, régionaux et thématiques indépendants.

En 2004, le Conseil d'État s'est prononcé pour la première fois sur le respect de cette obligation, introduite par la loi modificative n° 2000-719 du 1er août 2000, en jugeant que le Conseil supérieur de l'audiovisuel n'avait pas opéré une inexacte application de ces dispositions en rejetant la candidature d'un service local diffusant le programme d'un réseau thématique à vocation nationale (catégorie C) au profit de celle d'un réseau thématique à vocation nationale (catégorie D) dans une zone où les fréquences sont également réparties entre trois opérateurs locaux et trois opérateurs nationaux (CE 30 avril 2004 SARL Studio Vision Communication , Req. n° 241 948).

 


Le contentieux de la reconduction des autorisations

L'article 28-1 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée dispose que les autorisations délivrées aux services de radio et de télévision peuvent être reconduites par le CSA, hors appel aux candidatures, dans la limite de deux fois. Cette reconduction sans mise en concurrence est exclue dans cinq situations parmi lesquelles, pour les services de radio, lorsque le service en cause ne remplit plus les critères propres à sa catégorie d'autorisation.

Un an avant l'expiration de l'autorisation, le Conseil doit faire connaître par une décision motivée s'il estime que les conditions de la reconduction sont remplies. Dans l'affirmative, il doit indiquer, pour les services autres que radiophoniques, les points sur lesquels il souhaite modifier la convention qui définit les caractéristiques du service et les obligations auxquelles il est soumis. La négociation sur les termes d'une nouvelle convention doit aboutir par la signature de cette dernière au plus tard six mois avant l'expiration de l'autorisation. À défaut d'accord dans ce délai, l'autorisation n'est pas reconduite.

Sur la non-reconduction d'une autorisation d'un service de radio qui ne remplit plus les critères propres à sa catégorie d'autorisation

En 2004, le Conseil d'État s'est prononcé pour la première fois sur la mise en œuvre du critère de non-reconduction d'une autorisation accordée à un service de radio qui ne remplit plus les critères propres à sa catégorie d'autorisation. Dans deux affaires semblables (CE 9 février 2004 Association Radio Calaisis - Radio TSF , Req. n° 250 178, à mentionner aux tables du Recueil. CE 30 avril 2004 Association « Radio Télédiffusion Triomphe », Req. n° 249 693, à publier au Recueil), le CSA a décidé de ne pas reconduire hors appel à candidatures l'autorisation de services de catégorie A après avoir constaté une proportion de ressources publicitaires excédant le seuil au-delà duquel un service n'est plus éligible au Fonds de soutien à l'expression radiophonique alors que cette éligibilité conditionne l'appartenance à la catégorie A.

S'agissant de la base légale permettant au CSA d'exiger la fourniture de documents administratifs, le Conseil d'État a considéré que, sur le fondement des dispositions de l'article 19 de la loi selon lesquelles l'instance de régulation dispose d'un pouvoir d'investigation générale, le CSA peut exiger des éditeurs et distributeurs de services de radio et de télévision tout document lui permettant de s'assurer du respect des obligations qui leur sont imposées, notamment la production de leurs états financiers lors de la procédure de reconduction d'autorisation.

Sur le terrain de la procédure, le Conseil d'État a ensuite considéré qu'eu égard à la nature de la décision qui prive le bénéficiaire d'une autorisation d'émettre de la possibilité d'une reconduction de cette autorisation hors appel aux candidatures, le CSA ne peut refuser une telle reconduction sans avoir communiqué préalablement au bénéficiaire de l'autorisation les motifs sur lesquels il entend se fonder.

Sur le terrain de l'erreur de droit, le Conseil d'État a confirmé que, pour s'assurer qu'un service de catégorie A remplit toujours les critères propres à cette catégorie alors que son éligibilité au Fonds de soutien à l'expression radiophonique n'est pas avérée faute pour le service d'en avoir sollicité le bénéfice, le CSA est fondé à vérifier que les ressources publicitaires et de parrainage sont inférieures à 20% du chiffre d'affaires total et, dans la négative, est tenu de refuser de reconduire l'autorisation hors appel aux candidatures.

En d'autres termes, un service de catégorie A qui n'a pas demandé les aides du Fonds de soutien à l'expression radiophonique doit prouver au CSA qu'il remplit toujours les critères d'éligibilité à ce Fonds pour bénéficier de la reconduction, hors appel aux candidatures, de son autorisation dans cette catégorie.

Sur la négociation d'une nouvelle convention d'une chaîne de télévision et la possibilité pour le CSA de s'opposer à la diffusion de programmes susceptibles de nuire aux mineurs

Lors de la négociation des termes d'une nouvelle convention permettant la reconduction de l'autorisation du service Canal Antilles, le CSA, après avoir statué favorablement sur la possibilité d'une telle reconduction et mentionné les points principaux de la convention dont il souhaitait obtenir la révision, avait décidé de subordonner sa signature à l'introduction d'une clause interdisant totalement la diffusion des programmes de catégorie V, définis comme « les œuvres cinématographiques interdites aux mineurs de dix-huit ans ainsi que les programmes réservés à un public averti et qui, en particulier par leur caractère obscène, sont susceptibles de nuire à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs de dix-huit ans ».

Après avoir vu rejeté son recours gracieux, la société Canal Antilles s'est résignée à signer une convention conforme aux vœux du CSA puis a emprunté la voie contentieuse à deux reprises. D'abord sans succès puisque, par une décision du 19 mars 2003 (CE 19 mars 2003 Société Canal Antilles , Rec. p. 137) le Conseil d'État a rejeté la requête de la société Canal Antilles demandant l'annulation de la décision par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel avait approuvé le projet de convention. La haute assemblée a considéré que cette délibération constituait un acte préparatoire ne pouvant faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.

Tirant les conséquences de cette décision juridictionnelle, la société Canal Antilles a ensuite demandé au Conseil d'État d'annuler la clause de la nouvelle convention interdisant la diffusion de programmes de catégorie V, ainsi que la décision reconduisant son autorisation à laquelle est annexée la convention. Par une décision du 5 juillet 2004, le Conseil d'État a fait droit à la demande de la société Canal Antilles en particulier sur le terrain de la procédure. La Haute Assemblée a en effet relevé que la décision par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a statué favorablement sur la possibilité de reconduction de l'autorisation ne mentionnait pas la stipulation autorisant, sous certaines conditions, la diffusion par la société Canal Antilles de programmes de catégorie V parmi les points principaux de la convention en vigueur que l'instance de régulation souhaitait modifier.

Le Conseil d'État a ensuite considéré que la société Canal Antilles n'a eu connaissance du souhait du Conseil supérieur de l'audiovisuel de supprimer cette stipulation que dix-huit jours seulement avant l'expiration du délai de six mois imparti pour conclure une nouvelle convention. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel ne peut donc pas, au cours de la négociation d'une nouvelle convention, imposer aussi tardivement une modification importante de l'économie de la convention qui ne figurait pas dans la liste des clauses à renégocier, sauf à priver l'opérateur d'une garantie légale de négociation.

Le Conseil d'État a d'abord considéré que, si les stipulations et dispositions imposées par le CSA instituent une interdiction absolue de diffusion, par tout service de radio et de télévision, de programmes susceptibles de nuire gravement à l'épanouissement physique, mental et moral des mineurs, ces stipulations et dispositions imposent seulement, pour les programmes susceptibles de nuire à l'épanouissement physique, mental et moral des mineurs, que leur diffusion soit, par le choix de l'heure d'émission ou par des procédés techniques appropriés, assurée dans des conditions telles que les mineurs ne soient pas normalement susceptibles d'avoir accès à ces programmes.

La Haute Assemblée a ensuite relevé que, pour la mise en œuvre des dispositions de l'article 15 de la loi du 30 septembre 1986, le CSA a élaboré un dispositif reposant sur une classification des programmes en cinq catégories et qu'aux termes de cette classification, la catégorie V comprend les œuvres cinématographiques interdites aux mineurs de dix-huit ans ainsi que les programmes réservés à un public adulte averti et qui, en particulier par leur caractère obscène, sont susceptibles de nuire à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs de dix-huit ans.

En conséquence, le Conseil d'État a considéré que, dès lors que la catégorie V comprend des programmes relevant de cette dernière qualification, l'autorité de régulation, qui disposait d'un pouvoir d'appréciation pour définir le régime qui pouvait leur être appliqué, ne peut soutenir qu'elle se trouvait en situation de compétence liée pour imposer à la société Canal Antilles une interdiction totale de la diffusion des programmes de cette catégorie.


Le contentieux des sanctions

L'article 28 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée dispose que la délivrance des autorisations d'usage de fréquences pour chaque nouveau service diffusé par voie hertzienne terrestre est subordonnée à la conclusion d'une convention qui fixe les règles particulières applicables au service et définit notamment les pénalités contractuelles dont dispose le CSA pour assurer le respect des obligations conventionnelles. Ces pénalités sont identiques aux sanctions légales, à l'exception du retrait de l'autorisation qui ne peut résulter que d'un manquement à une obligation légale ou réglementaire, et leur prononcé obéit à la même procédure.

En 2004, le Conseil d'État a confirmé la légalité d'une décision réduisant de deux mois la durée d'une autorisation accordée à un service de radio ne respectant pas ses obligations conventionnelles de programmes. L'affaire a concerné un service local de radio qui s'était engagé, aux termes d'une convention conclue en juin 1999, à diffuser un programme visant à la découverte du monde afro-caribéen, sud-américain et de l'océan Indien par l'intermédiaire de musiques, magazines d'information et d'émissions culturelles. Toutefois, l'écoute des programmes du service opérée en juin 2001 a révélé la diffusion d'un programme non conforme à la convention. Le CSA a décidé de mettre le titulaire de l'autorisation en demeure de respecter ses obligations.

Six nouvelles écoutes réalisées entre octobre 2001 et février 2002 ont néanmoins confirmé que la station méconnaissait toujours ses obligations. Le CSA a décidé de sanctionner ce manquement par le prononcé d'une mesure de suspension de l'autorisation pendant une durée de vingt-quatre heures. En dépit de cette sanction, huit nouvelles écoutes effectuées entre mai 2002 et janvier 2003 ont permis de constater la persistance du manquement. Le CSA a, en conséquence, décidé de réduire de deux mois la durée de l'autorisation.

Par une décision du 24 novembre 2004 (CE 24 novembre 2004 Association Radio Sun FM, Req. n° 258 076), le Conseil d'État a confirmé la sanction en considérant notamment que les faits de l'espèce étaient de nature à justifier une sanction et, qu'eu égard à la gravité des manquements reprochés et à leur répétition, la sanction infligée ne présentait pas un caractère excessif.


Le contentieux du conventionnement des chaînes du câble et du satellite

Aux termes des dispositions des articles 33-1 et 43-4 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, les chaînes de télévision diffusées par satellite ou distribuées sur les réseaux câblés qui sont établies en dehors de l'Union européenne, mais qui utilisent une capacité satellitaire relevant de la compétence de la France, doivent conclure une convention avec le Conseil supérieur de l'audiovisuel. Toutefois, plus d'une centaine de chaînes diffusées par l'intermédiaire de la société Eutelsat ne sont pas signataires d'une convention avec l'instance de régulation française.

Au cours de l'année 2002, le CSA avait été saisi par la société Médya TV d'une demande de conventionnement pour la diffusion d'une chaîne de télévision à destination de la communauté kurde installée en Europe. En l'absence de réponse expresse à sa demande, la société Médya TV a saisi le Conseil d'État d'une demande d'annulation de la décision implicite de rejet née du silence du Conseil supérieur de l'audiovisuel.

Par une décision du 11 février 2004 (CE 11 février 2004 Société Médya TV, Req. n° 249 175, à publier au Recueil), le Conseil d'État a rejeté la requête en considérant que l'instance de régulation n'était pas tenue d'accepter toutes les demandes de conventionnement des chaînes et qu'il pouvait refuser de signer une convention. En ce qui concerne la base légale du refus de conventionnement, le Conseil d'État a considéré que les dispositions de l'article 33-1 de la loi donnent au CSA compétence pour refuser de conclure une convention et que pour prendre une telle décision, le CSA peut se fonder sur la sauvegarde de l'ordre public qui, en vertu de l'article 1er de la loi, peut limiter, dans la mesure requise, l'exercice de la liberté de communication mais qu'il incombe alors au CSA de concilier l'exercice de ses pouvoirs avec le respect de cette liberté, sous le contrôle du juge.

S'agissant des motifs du refus que le CSA a présentés en défense compte tenu du caractère implicite de la décision, le Conseil d'État a considéré que les éléments précis versés au dossier par le CSA, dont la réalité n'avait pas été démentie par les précisions et les informations fournies par la société Médya TV, démontraient l'existence d'un faisceau concordant d'indices de l'existence de liens étroits entre cette société et le PKK, organisation politique dont l'émanation intitulée Comité du Kurdistan a été dissoute en France par un décret du 2 décembre 1993 et qui a été inscrite, le 2 mai 2002, sur la liste des organisations terroristes établie par l'Union européenne. La Haute Assemblée a également relevé que les pièces du dossier faisaient ressortir que la demande de conventionnement adressée au CSA par la société Médya TV avait été présentée quelques mois après que la licence de la chaîne Med TV, diffusée au Royaume-Uni, et également liée au PKK, eut été retirée par l'organe de régulation britannique à la suite de nombreuses infractions à la législation britannique et notamment d'encouragements à la violence et d'incitations au crime.

Le Conseil d'État a enfin estimé que si le PKK s'était volontairement dissous en 2002 et avait été remplacé par un autre parti politique qui ne prône plus le recours à la lutte armée, le CSA ne s'était pas livré, en l'état des éléments dont il disposait, à une appréciation erronée des circonstances en estimant que les risques pour l'ordre public susceptibles d'être créés, tant en France que dans plusieurs pays européens, par la diffusion du programme de télévision proposé par la société Médya TV, étaient d'une gravité suffisante pour justifier le rejet de la demande de conventionnement présentée par la société.


Le contentieux relatif au pouvoir de recommandation

Aux termes de l'article 1er de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, le Conseil supérieur de l'audiovisuel veille notamment à la qualité des programmes et peut adresser aux éditeurs et distributeurs de radio et de télévision des recommandations relatives au respect des principes énoncés par la loi précitée.

Après avoir constaté que, depuis le printemps 2001, les émissions comportant des incitations à appeler des services téléphoniques surtaxés ou des services télématiques se sont fortement développées à l'antenne des chaînes hertziennes nationales publiques et privées, notamment en vue de participer à des jeux, d'exprimer un vote ou un témoignage ou de faire acte de candidature (Qui veut gagner des millions ?, Élection de Miss France, Loft Story, Star Academy, etc.), le CSA a adopté le 5 mars 2002 une recommandation qui rappelle à l'ensemble des services de télévision les principes auxquels ils sont soumis et en particulier précise les conditions pour que ces incitations, faites en dehors des écrans publicitaires, ne soient pas considérées comme relevant de la publicité clandestine prohibée par les dispositions de l'article 9 du décret n° 92-280 du 27 mars 1992.

Ce faisant, le Conseil a rappelé aux chaînes que ces incitations doivent s'inscrire dans le prolongement direct d'un programme en cours de diffusion, que les téléspectateurs doivent être informés du coût des communications par un affichage identique à celui des coordonnées téléphoniques ou télématiques, ainsi que des possibilités de remboursement des sommes exposés dans le cadre des jeux de hasard, et qu'il doit être offert aux téléspectateurs la possibilité de se manifester par des voies moins onéreuses que les services en cause.

La société TF1 a formé un recours gracieux puis contentieux contre cette recommandation. Par une décision du 9 février 2004 (CE 9 février 2004 Société Télévision française 1, Req. n° 205 258), le Conseil d'État l'a rejeté en considérant « qu'il entrait dans les missions [du CSA], en application des dispositions précitées de la loi du 30 septembre 1986 modifiée [les articles 1er et 42] de rappeler les règles auxquelles les opérateurs sont tenus, non seulement en matière de prohibition de la publicité clandestine, mais également en ce qui concerne l'information du public et la législation instaurant une prohibition des jeux de hasard impliquant une mise de fonds de la part des participants ».

En l'espèce, le Conseil d'État a estimé que l'obligation d'un lien avec le programme en cours ne constituait pas une interprétation erronée des dispositions de l'article 9 du décret du 27 mars 1992 prohibant la publicité clandestine, que l'obligation d'informer les téléspectateurs sur les coûts des communications dans des caractères identiques à ceux des coordonnées téléphoniques ou télématiques ne constituait pas une interprétation erronée de l'article 14 de l'arrêté du 3 décembre 1987 relatif à l'information de consommateurs sur les prix, et que l'obligation de les informer sur les possibilités de remboursement des dépenses engagées dans le cadre de jeux de hasard ne constituait pas une interprétation erronée de la loi du 21 mai 1836 relative aux loteries.

Cette décision marque une avancée notable sur les questions de la compétence de l'instance de régulation et de la mise en œuvre de son pouvoir de recommandation. En effet, cette décision reconnaît le caractère impératif des recommandations et la possibilité de prononcer des sanctions à l'égard de ceux qui manqueraient aux obligations qu'elles contiennent. Au final, cette décision confirme la compétence du CSA pour faire respecter toutes les obligations relatives aux programmes diffusés par les services de radio et de télévision y compris celles résultant des dispositions étrangères à celles contenues dans la loi du 30 septembre 1986 modifiée et ses décrets d'application.


L'application du dispositif anticoncentration à la télévision numérique terrestre

Par délibération du 10 juin 2003, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a, au terme de la procédure d'appel aux candidatures lancée le 24 juillet 2001, délivré vingt-trois autorisations pour l'exploitation de services nationaux de télévision diffusés en mode numérique. La société TF1 a demandé au Conseil d'État d'annuler les autorisations délivrées aux services Canal+, iMCM, Canal J, Sport+, I-télé, Ciné Cinéma Premier et Planète.

À l'appui de ses requêtes, elle soutenait que le CSA avait inexactement apprécié le contrôle exercé sur les sociétés Canal J et MCM dès lors que la société Lagardère Thématiques, qui les contrôle, était indirectement contrôlée conjointement par les groupes Canal+ et Lagardère, plaçant le groupe Canal+ en situation de détenir un nombre maximum d'autorisations supérieur au plafond légal de cinq autorisations de télévision en mode numérique délivrées à un même groupe.

Par une décision du 20 octobre 2004 (CE 20 octobre 2004 Société TF1, Req. n° 260898, à publier au Recueil), le Conseil d'État a annulé six des sept autorisations attaquées au terme d'une analyse le conduisant à déterminer les modalités de contrôle de la société Lagardère Thématiques par les groupes Lagardère et Canal+ pour conclure que le contrôle conjoint des sociétés Canal J et MCM par le groupe Canal+ aboutissait à lui faire détenir, directement ou indirectement, seul ou conjointement, sept autorisations.

Le Conseil d'État a d'abord rappelé que les dispositions du 3e alinéa de l'article 41 de la loi du 30 septembre 1986, dans sa rédaction en vigueur à la date des autorisations attaquées, limitaient à cinq le nombre maximal d'autorisations, relatives chacune à un service ou programme national de télévision diffusé par voie hertzienne terrestre en mode numérique, dont une même personne peut être titulaire directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés qu'elle contrôle.

La Haute Assemblée a ensuite estimé que l'existence du contrôle indirect de plusieurs personnes par une autre devait être déterminée, en dehors du cas particulier où elle a placé ces sociétés sous son autorité ou sa dépendance, au regard des critères de l'article L. 233-3 du Code de commerce, codifiant les dispositions de l'article 355-1 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 dans leur rédaction modifiée par les lois du 15 mai 2001 et du 11 décembre 2001, qui dispose notamment, d'une part, qu'une société en contrôle une autre lorsqu'elle dispose de la majorité des droits de vote, d'autre part, que le contrôle conjoint défini par le III dudit article L. 233-3 est caractérisé lorsque deux ou plusieurs personnes déterminent en commun les décisions des assemblées générales d'une société, dans le cadre d'un accord relatif à l'exercice de leurs droits de vote et tendant à la mise en oeuvre d'une politique commune à l'égard de cette société et qu'il en va de même lorsque l'une d'entre elles dispose de droits de vote qui en l'absence d'un tel accord lui auraient permis de déterminer seule lesdites décisions.

À la lumière de ces principes, le Conseil d'État a analysé les liens qui unissent les sociétés Canal+ et Largadère Images et déterminé les modalités de contrôle, par l'intermédiaire de la société Lagardère Thématiques, des sociétés Canal J et MCM.

Il a, en premier lieu, relevé que, si le groupe Canal+ détenait, outre les autorisations des services Canal+, Sport +, I-Télé, Ciné Cinéma et Planète, 49 % du capital de la société Lagardère Thématiques, qui contrôle elle-même les sociétés Canal J et MCM, aux côtés du groupe Lagardère, par l'intermédiaire de la société Lagardère Images qui détient les 51% restant du capital, les sociétés groupe Canal+ et Lagardère Images sont cependant liées par une convention d'actionnaires en date du 28 juillet 2000 qui, à défaut d'avoir été communiquée au Conseil supérieur de l'audiovisuel lors de l'instruction des candidatures, a été versée aux débats, à la demande du Conseil d'État, dans le cadre de l'instruction de l'affaire.

En deuxième lieu, la Haute Assemblée a considéré que les stipulations de cette convention avaient pour objet et pour effet de subordonner la définition de la stratégie de la société Lagardère Thématiques à un accord entre ses deux actionnaires qui, dans les circonstances habituelles de direction d'une société, doivent dès lors être regardés comme déterminant en commun, dans le cadre d'un accord relatif à leurs droits de vote, les décisions de ses assemblées générales et comme exerçant ainsi un contrôle conjoint, au sens du III de l'article L. 233-3 du Code de commerce, sur cette société et, par l'intermédiaire de celle-ci, sur les sociétés Canal J et MCM, dont elle détient l'intégralité du capital.

En conséquence, le Conseil d'État a considéré, en troisième lieu, que, pour l'application de l'article 41 de la loi du 30 septembre 1986, le groupe Canal+ était cotitulaire, avec le groupe Lagardère, des autorisations données par le CSA aux sociétés MCM et Canal J et ainsi détenteur, compte tenu des cinq autres autorisations accordées, de sept autorisations de diffusion par voie hertzienne terrestre en mode numérique en violation des dispositions de l'article 41 de la loi du 30 septembre 1986 qui fixaient à cinq le nombre maximal d'autorisations pour une même personne.

La Haute Assemblée a donc estimé que la violation de ces dispositions entachait d'illégalité l'ensemble des autorisations accordées aux services relevant du contrôle direct ou indirect de la société Canal+ à l'exception de l'autorisation qui lui a été accordée, en vertu de l'article 30-III de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, pour la reprise de son service de télévision par voie hertzienne terrestre en mode numérique qui est assimilée à l'autorisation initiale et n'en constitue qu'une extension.

Compte tenu des difficultés sérieuses d'exécution de la décision rendue par le Conseil d'État le 20 octobre 2004, le CSA a souhaité, sur le fondement des dispositions de l'article R. 931-1 du Code de justice administrative, être éclairé par l'avis de la Section du rapport et des études du Conseil d'État et a saisi le vice-président du Conseil d'État d'une demande en ce sens.

En effet, l'annulation a été prononcée pour un motif - le dépassement d'un seuil anticoncentration - qui n'a pas remis en cause l'appréciation portée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel sur les candidatures retenues au terme du processus de mise en concurrence alors que la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle a porté de cinq à sept le nombre maximum d'autorisations pouvant être détenues par une même personne.

En réponse à la demande d'avis, le président de la Section du rapport et des études du Conseil d'État a informé le Conseil supérieur de l'audiovisuel que l'attribution des nouvelles autorisations d'utiliser la ressource hertzienne devenue disponible par l'effet de l'annulation juridictionnelles des autorisations impliquait nécessairement, pour le CSA, d'organiser un nouvel appel à candidatures ouvert à tous les candidats intéressés.

Après avoir procédé à une consultation publique, conformément aux dispositions de l'article 31 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, le Conseil a lancé le 14 décembre 2004 un nouvel appel aux candidatures pour l'attribution de la ressource disponible.


Le contentieux des chaînes satellitaires non conventionnées

La loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 précitée a accru les pouvoirs du Conseil supérieur de l'audiovisuel à l'égard des chaînes de télévisions extra-communautaires diffusées sur des fréquences satellitaires relevant de la compétence de la France, notamment à l'égard de celles qui n'ont pas signé une convention avec l'instance de régulation en violation de l'article 33-1 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée.

D'une part, le nouvel article 19 de ladite loi autorise le CSA à demander aux opérateurs de réseaux satellitaires « toutes informations nécessaires à l'identification des éditeurs de services de télévision transportés ». D'autre part, le nouvel article 42-10 étend la procédure dite du référé-audiovisuel - qui permet au président du CSA de saisir le président de la Section du contentieux du Conseil d'État d'une demande tendant à ce qu'il soit ordonné à l'auteur d'un manquement aux obligations résultant de la loi du 30 septembre 1986 modifiée de s'y conformer - afin de faire cesser la diffusion, par un opérateur satellitaire, d'un service de télévision relevant de la compétence de la France dont les programmes portent atteinte à l'un au moins des principes mentionnés aux articles 1er, 3-1 ou 15 de ladite loi, lesquels incluent notamment l'ordre public, le protection de l'enfance et de l'adolescence et l'interdiction de toute incitation à la haine ou à la violence pour des raisons de sexe, de mœurs, de religion ou de nationalité.

Après avoir saisi en vain le procureur de la République le 13 janvier 2004, le CSA a mis en œuvre dès le 12 juillet 2004 la nouvelle possibilité offerte par l'article 42-10 de la loi en demandant au président de la Section du contentieux du Conseil d'État d'enjoindre, sous astreinte, à la société Eutelsat de faire cesser la diffusion du service Al Manar qui ne disposait pas de convention et qui avait diffusé des programmes incitant à la haine raciale ou à la violence pour des raisons de religion ou de nationalité.

Par une ordonnance du 20 août 2004 (CE Ord. 20 août 2004 Président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, Req. n° 269813, à publier au Recueil) (cf. annexe), le juge des référés s'est employé à articuler la demande d'interdiction formulée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel et la volonté affichée par la chaîne de se soumettre à la procédure de conventionnement avec le CSA prévue par la loi précitée, la société éditrice ayant sollicité de l'instance de régulation, la veille de l'audience publique, la signature d'une convention. Tout en fixant une échéance (le 30 novembre 2004) au-delà de laquelle la société Eutelsat était tenue de faire cesser la diffusion d'Al Manar, le juge des référés a permis à la chaîne de présenter au CSA, avant le 1er octobre 2004, un dossier complet de demande de conventionnement et prévu que, dans le cas d'un rejet par le CSA de la demande de conventionnement présentée par Al Manar, Eutelsat devait faire cesser la diffusion sur ses satellites de la chaîne de télévision incriminée dans un délai de deux mois suivant la notification du rejet.

À cette occasion, le juge des référés a également précisé que les dispositions de l'article 42-10 en cause tendent non pas à l'infliction d'une sanction, mais à la prévention de la survenance ou de la réitération d'une atteinte aux principes essentiels que doit respecter un service de communication audiovisuelle. En conséquence, il a considéré que le principe constitutionnel de non-rétroactivité des dispositions répressives ne fait pas obstacle à l'application immédiate de ces dispositions y compris par référence à des programmes diffusés avant l'intervention de la loi du 9 juillet 2004.

Se conformant à l'ordonnance, Al Manar a présenté le 21 septembre 2004 au CSA une demande de conventionnement et s'est notamment engagée à ne pas diffuser de programmes susceptibles d'inciter à la violence ou à la haine pour des raisons de religion ou de nationalité. Au terme de l'instruction de cette demande, le CSA a décidé le 19 novembre 2004 de signer une convention, permettant la diffusion de la chaîne Al Manar en Europe, conclue pour une durée d'une année et assortie d'obligations propres à garantir l'interdiction de diffuser notamment des programmes susceptibles d'entraîner des troubles à l'ordre public ou d'encourager des attitudes de rejet ou de xénophobie.

Toutefois, le CSA a constaté, le 23 novembre 2004, plusieurs manquements graves de la chaîne aux dispositions de l'article 15 de la loi précitée qui prohibent la diffusion de tout programme contenant une incitation à la haine ou à la violence pour des raisons de religion ou de nationalité. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel a décidé de mettre la société éditrice de la chaîne Al Manar en demeure de se conformer à ses obligations et le président du CSA a demandé au président de la Section du contentieux du Conseil d'État d'enjoindre à la société Eutelsat de faire cesser la diffusion sur ses satellites des services de télévisions Al Manar.

Par une ordonnance du 13 décembre 2004 (CE Ord. 13 décembre 2004 Président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, Req. n° 274757, à publier au Recueil, AJDA 2005, p. 206) (cf. annexe), le président de la Section du contentieux du Conseil d'État, statuant en référé, a enjoint à la société Eutelsat de faire cesser, sous 48 heures et à peine d'une astreinte de 5 000 euros par jour de retard, la diffusion, sur ses capacités satellitaires, de la chaîne de télévision Al Manar.

Le président de la Section du contentieux a d'abord présenté les dispositions législatives applicables en précisant l'articulation entre les pouvoirs du Conseil d'État, au regard des dispositions de l'article 42-10 de la loi, et du Conseil supérieur de l'audiovisuel, agissant sur le fondement de l'article 42 de la même loi. La société éditrice de la chaîne de télévision Al Manar faisait en effet valoir qu'elle avait conclu avec le CSA le 19 novembre une convention définissant ses obligations au regard de la loi française et que ce conventionnement faisait obstacle à l'usage de la procédure de référé. L'ordonnance juge au contraire que cette procédure, dont la portée a été accrue par la loi du 9 juillet 2004, a vocation à s'appliquer, que l'opérateur de télévision soit ou non signataire d'une convention avec l'autorité de régulation. La même société soutenait en outre qu'une procédure de sanction ayant été engagée à son encontre par le CSA sur le fondement des articles 42 à 42-7 de la loi du 30 septembre 1986, la procédure de référé n'était plus susceptible d'être utilisée à raison des mêmes faits. L'ordonnance juge sur ce point que les deux procédures - dont les buts sont différents - peuvent être engagées parallèlement.

Sur le fond, le juge des référés a constaté ensuite qu'en dépit des avertissements prodigués par le CSA, la chaîne de télévision Al Manar avait continué, après la signature de la convention du 19 novembre, à éditer certaines émissions au contenu ouvertement contraire aux dispositions de l'article 15 de la loi du 30 septembre 1986, qui prohibent la diffusion de tout programme contenant une incitation à la haine ou à la violence pour des raisons de religion ou de nationalité. Compte tenu des risques pesant dès lors sur la sauvegarde de l'ordre public, le président de la Section du contentieux du Conseil d'État a donc enjoint à la société de droit français Eutelsat, dont les capacités satellitaires sont utilisées pour la diffusion d'Al Manar, de faire cesser cette diffusion dans les 48 heures.

Il est à noter que la procédure de sanction engagée le 7 décembre 2004 par le Conseil supérieur de l'audiovisuel sur le fondement des articles 42-1 et 42-7, consécutivement au constat du non-respect de la mise en demeure du 30 novembre 2004, a conduit l'instance de régulation, après avoir entendu les représentants de la chaîne Al Manar, à décider le 17 décembre 2004 de résilier la convention dont la société éditrice de la chaîne était signataire.