Saisi pour avis par le Gouvernement, en application de l’article 9 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, de deux articles d’un projet de loi relatif à l’égalité entre les femmes et les hommes, le Conseil supérieur de l’audiovisuel, réuni en assemblée plénière le 4 juin 2013, émet l’avis suivant.
I. ― Observations générales
Le Conseil rappelle son attachement aux principes constitutionnels d’égalité entre les hommes et les femmes et d’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales, ce dernier ayant été rappelé récemment par le Conseil d’Etat dans une décision du 7 mai 2013 (Assemblée, n° 362280).
Il considère que la progression des droits des femmes appelle une mobilisation de l’ensemble des acteurs de la société afin que l’égalité entre les femmes et les hommes s’inscrive comme une priorité dans tous les secteurs.
Les médias audiovisuels, parce qu’ils concourent à former les esprits, jouent un rôle déterminant pour la progression de ces droits. La problématique des droits des femmes appliquée aux médias doit à la fois prendre en compte leur représentation à l’antenne mais aussi leur place dans ce secteur spécifique d’activité économique.
En tant qu’autorité indépendante, le Conseil se doit lui-même d’incarner l’exemplarité de l’Etat dans le domaine de la parité afin de se donner les moyens de changer la façon d’élaborer les politiques publiques. Il salue la démarche du législateur pour rendre cette parité effective au sein des instances de régulation, parité qui correspond aussi à un meilleur équilibre et une meilleure représentativité du collège tel que préconisé par le rapport (n° 2925) du 28 octobre 2010 du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée nationale sur les autorités administratives indépendantes.
II. ― Observations sur les dispositions spécifiques soumises à l’avis du Conseil
Dispositions concernant les compétences du Conseil
S’agissant de l’introduction d’un troisième alinéa à l’article 3-1 de la loi du 30 septembre 1986 qui définit le rôle et les missions du Conseil, ce dernier en approuve la rédaction proposée qui lui confère une compétence explicite concernant les droits des femmes renforçant ainsi son champ d’intervention à l’égard de tout manquement à ces droits. Il relève la volonté du législateur de lui confier un pouvoir de contrôle sur la juste représentation des femmes sur les antennes des services de communication audiovisuelle et sur leur image.
Il note que le respect des dispositions introduites par la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites aux femmes est désormais au cœur de ses missions. Le Conseil souhaite cependant que la lutte contre les stéréotypes soit affirmée en premier lieu dans la rédaction de l’article car elle constitue la première étape dans la gradation des termes.
Par ailleurs, le Conseil regrette que le projet n’ait pas introduit au quatrième alinéa de ce même article une disposition lui permettant d’engager également un dialogue avec les éditeurs concernant leur propre structure afin qu’ils concilient leurs objectifs de développement avec celui de la protection des droits des femmes.
S’agissant des programmes proposés à l’antenne, le Conseil souscrit à l’introduction d’un nouvel article 20-5 dans la loi du 30 septembre 1986. Il souligne la nécessité d’impliquer les éditeurs dans une démarche éditoriale positive de contribution à la lutte contre les préjugés sexistes et les violences faites aux femmes et engagera sur ce point une concertation avec les éditeurs quant à la fixation des conditions d’application de cet article. Le Conseil relève cependant que cette disposition devrait, pour garantir une égalité de traitement, inclure également les éditeurs radiophoniques.
Le projet modifie l’article 43-11 de la loi du 30 septembre 1986 sur les missions des sociétés du secteur public en prévoyant, d’une part, que les mots : « les préjugés sexistes » soient remplacés par : « des droits des femmes. Elles s’attachent notamment à promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes et à lutter contre les préjugés sexistes » et, d’autre part, en supprimant les mots : « et de l’égalité entre les hommes et les femmes ». Le Conseil note que le législateur entend ainsi renforcer la contribution du service public par ses actions à la progression des droits des femmes dans toutes ses composantes. Le Conseil demeurera, pour sa part, très attentif à ce que le service public joue pleinement son rôle de référent du secteur audiovisuel sur cette question et en fasse un objectif de premier rang.
Dispositions concernant les mesures visant à instituer la parité au sein des autorités administratives indépendantes
Le Conseil s’interroge sur le recours aux ordonnances pour instituer la parité au sein des autorités administratives indépendantes. Il souligne l’importance d’un débat parlementaire concernant les modes de nominations au sein de ces autorités.
Le Conseil approuve le progrès que constitue l’institution de la parité, ou, à défaut, la fixation d’un seuil minimal de 40 % de personnes de chaque sexe, au sein des collèges des autorités administratives indépendantes. A défaut de pouvoir atteindre lors de chaque désignation de nouveaux membres la parité ou ce seuil minimal, le Conseil considère que chacune des désignations devra elle-même contribuer à faire respecter la parité ou ce seuil minimal au sein du collège constitué.
Le présent avis sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 4 juin 2013.
Le président,
O. Schrameck