Saisi pour avis par le Gouvernement, en application de l'article 48 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, d'un projet de décret modifiant le cahier des charges de la société nationale de programme France Télévisions, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, réuni en assemblée plénière le 12 février 2013, émet l'avis suivant.
I. ― Observations générales
Le conseil rappelle son attachement à la conclusion d'accords professionnels entre éditeurs de services et organisations professionnelles représentatives de la création audiovisuelle. Il salue la flexibilité du dispositif qui permet à tout éditeur de se rapprocher des organisations professionnelles pour adapter les modalités spécifiques de sa contribution au développement de la production audiovisuelle.
Le conseil note que le projet de décret dont il est saisi pour avis illustre cette souplesse. Ce texte prévoit, compte tenu de l'avenant du 22 novembre 2012 à l'accord du 22 octobre 2008 signé entre les organisations professionnelles de la production audiovisuelle et France Télévisions, la possibilité de prendre en compte de nouvelles dépenses au sein de la contribution de ce dernier :
― les dépenses de financement de festivals consacrées à des œuvres audiovisuelles, dans la limite de 0,1 % du montant de l'obligation ;
― des dépenses « externes d'achat d'espaces publicitaires et de campagnes d'affichage consacrées à des œuvres identifiées sur lesquelles porte la contribution [...] » ;
― les dépenses engagées au titre de l'exercice précédent qui n'ont pas été prises en compte au titre de ce dernier, dans la limite de 2 % de l'obligation de l'exercice en cours.
Le conseil approuve l'intégration, au sein de la contribution de France Télévisions à la production audiovisuelle, de ces trois types de dépenses qui étaient déjà comptabilisées dans la contribution des autres éditeurs de services de télévision diffusés en clair.
Il considère que les dépenses de financement de festivals et de promotion des œuvres contribuent au développement global du secteur de la production audiovisuelle.
La valorisation des dépenses de promotion des œuvres favorise en effet le meilleur rayonnement de celles-ci, ce qui bénéficie indirectement à tous les partenaires de la création.
La possibilité offerte aux éditeurs de services de valoriser, dans une certaine limite, des dépenses de financement de festivals consacrées à des œuvres audiovisuelles constitue, quant à elle, une incitation à financer l'organisation de ces festivals, essentiels à la vitalité du secteur. Le conseil relève que France Télévisions et les organisations signataires de l'accord professionnel ont néanmoins souhaité limiter ces dépenses plus strictement que par le seuil réglementaire de 1 % applicable aux autres éditeurs de services diffusés en clair. Ainsi, les modalités de la contribution à la production audiovisuelle de France Télévisions demeurent plus exigeantes que celles applicables aux autres éditeurs de services diffusés en clair et dont le chiffre d'affaires est supérieur à 350 millions d'euros.
Quant à la prise en compte de dépenses engagées au cours de l'exercice précédent, cette mesure a l'avantage de donner plus de souplesse aux éditeurs dans la gestion de leurs investissements en production audiovisuelle. Elle leur permet en effet de lisser sur deux exercices un apport financier particulièrement important et de participer ainsi au financement de projets impliquant des coûts de production plus élevés. Le conseil note que la volonté d'apporter plus de souplesse dans la gestion des investissements de France Télévisions n'est pas allée jusqu'à prévoir la possibilité de tenir compte d'une baisse éventuelle de son chiffre d'affaires, dans les conditions prévues au 7° de l'article 14 du décret n° 2010-747 du 2 juillet 2010 relatif à la contribution à la production d'œuvres cinématographiques et audiovisuelles des services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre.
Le conseil observe avec satisfaction que l'accord fait mention d'un engagement de France Télévisions de communiquer chaque année aux organisations signataires la liste des œuvres concernées par les nouvelles dépenses ainsi prises en compte. Le conseil considère néanmoins que cet engagement aurait pu utilement figurer dans le cahier des charges du groupe public.
De manière générale, le conseil encourage les éditeurs de services à rendre compte régulièrement aux organisations signataires des accords professionnels de la réalisation des engagements souscrits.
II. ― Observations sur les dispositions spécifiques
Le conseil relève que, conformément à l'accord professionnel susmentionné, la rédaction actuelle du projet de décret limite la prise en compte des dépenses de promotion, pour des œuvres valorisées au titre de la contribution, aux dépenses externes d'achats d'espaces publicitaires excluant notamment celles liées aux « projections de presse », compte tenu de la différence de rédaction avec le 7° de l'article 12 du décret n° 2010-747 du 2 juillet 2010.
Le conseil note que le projet de décret ne rappelle pas la limitation de ces dépenses mais que, conformément au décret n° 2010-747 et au même accord professionnel, cette prise en compte doit être limitée à 5 % du devis de production et à 0,5 % du montant de l'obligation. Pour éviter toute incertitude, il conviendrait de compléter la rédaction du projet de décret sur ce point.
Concernant le seuil à compter duquel ces mêmes dépenses peuvent être comptabilisées au sein de la contribution, l'accord professionnel stipule que seront prises en compte les dépenses excédant un montant total annuel de 500 000 euros qui correspond au montant annuel moyen des dépenses de promotion des œuvres audiovisuelles dites « patrimoniales » constaté en 2010 et 2011. Le projet de décret dispose, quant à lui, que seule sera prise en compte la part des dépenses excédant 500 000 euros, sans préciser que ce montant est annuel. Le conseil recommande de compléter la rédaction du cahier des charges en ce sens.
Par transposition de l'avenant à l'accord pluriannuel liant France Télévisions et les organisations représentatives des producteurs audiovisuels, le texte permet en outre l'acquisition par France Télévisions des droits pour une multidiffusion supplémentaire sur ses services régionaux et locaux de télévision diffusés outre-mer. Le conseil note que cette faculté permettra au groupe public d'enrichir plus aisément ses programmes diffusés outre-mer. Il demeurera, par ailleurs, très attentif à la situation économiquement difficile des services locaux de télévision privés ultra-marins.
Il s'interroge, en outre, sur la rédaction du projet de décret, qui mentionne cette multidiffusion supplémentaire à l'article 9 du cahier des charges annexé au décret n° 2009-796 du 23 juin 2009. Pour éviter toute erreur d'interprétation, le conseil considère que cette disposition devrait plutôt figurer dans l'annexe au cahier des charges relative à l'étendue des droits cédés.
Pour la mise en œuvre des remarques ci-dessus, le conseil propose les modifications rédactionnelles mentionnées en annexe au présent avis.
Le présent avis sera publié au Journal officiel de la République française.
Consultez, sur la page du Journal officiel indiquée ci-dessus, l'annexe de cet avis.