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Décision du CSA

Al Manar : le Conseil décide d'engager une procédure de sanction

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Assemblée plénière du

A la suite de la mise en demeure prononcée le 30 novembre 2004 à l'encontre de la chaîne Al Manar, le Conseil a décidé d'engager une procédure de sanction après avoir relevé, sur son antenne, de nouveaux propos susceptibles de constituer un manquement à l'article 15 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée et aux articles 2-3-1 et 2-3-3 de la  convention de la chaîne.
Voici le contenu de la lettre adressée ce jour par le CSA au président de la société Lebanese Communication Group, éditrice de la chaîne Al Manar :
 
"Monsieur le Président,

Le 19 novembre 2004, le Conseil supérieur de l'audiovisuel et la société Lebanese Communication Group SAL, qui édite le service de télévision Al Manar, ont signé une convention par laquelle vous vous engagez à respecter les lois et règlements applicables en France et les stipulations y figurant.
 
Le 30 novembre 2004, le Conseil supérieur de l'audiovisuel vous a mis en demeure, par une décision dont la notification a été assurée le 1er décembre 2004 entre les mains de votre conseil, Maître Denis GARREAU, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation dûment mandaté par vos soins à cet effet, de respecter à l'avenir l'article 15 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée et les articles 2-3-1 et 2-3-3 de la convention susmentionnée.
 
Or, il résulte d'une écoute de vos programmes que les commentaires suivants ont été tenus au cours du journal télévisé diffusé en français le 2 décembre 2004 vers 23h30 : "Israël mène une campagne sans précédent contre la chaîne Al Manar pour l'empêcher de diffuser en Europe. C'est ce qu'a avoué ce jeudi la télévision israélienne qui a révélé que le gouvernement israélien a multiplié ses efforts, tirant les ficelles par ci et par là, pour empêcher la chaîne de télévision de révéler aux téléspectateurs européens, aux résidents étrangers en Europe, la réalité des faits et de la situation, les crimes contre l'humanité perpétrés par Israël, aussi bien en Palestine occupée que dans le monde...".
 
Ces propos selon lesquels la chaîne de télévision Al Manar entend, de son propre aveu, "révéler aux téléspectateurs européens, aux résidents étrangers en Europe, la réalité des faits et de la situation, les crimes contre l'humanité perpétrés par Israël, aussi bien en Palestine occupée que dans le monde..." sont susceptibles de constituer une incitation à la haine ou à la violence pour des raisons de religion ou de nationalité, et, par suite, de violer l'article 15 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée et l'article 2-3-1 de la convention susmentionnée.
 
Le Conseil vous rappelle, qu'aux termes de l'article 15, dernier alinéa, de la loi précitée  : "il [le Conseil supérieur de l'audiovisuel] veille enfin à ce que les programmes ne contiennent aucune incitation à la haine ou à la violence pour des raisons de [...] race, de religion ou de nationalité ".
 
Par ailleurs,  votre société s'est engagée à l'article 2-3-1 de la convention "à ne pas inciter à la haine, à la violence [...] pour des raisons de [...] de religion ou de nationalité" comme "de traiter avec pondération et rigueur les sujets susceptibles d'alimenter ou d'entraîner, en France et en Europe, des tensions et des antagonismes, envers certaines communautés ou certains pays". Or, il apparaît que la chaîne vise particulièrement les "téléspectateurs européens" et les "résidents étrangers en Europe" quand elle prétend qu'Israël est coupable de "crimes contre l'humanité".

En outre, ces mêmes propos sont susceptibles de constituer un manquement à l'exigence d'honnêteté de l'information, et partant un manquement aux stipulations de l'article 2-3-3 de votre convention selon lequel "l'exigence d'honnêteté de l'information s'applique à l'ensemble des programmes" et "les journalistes, présentateurs, animateurs ou collaborateurs d'antenne veillent à respecter une présentation honnête des questions conflictuelles".

Il ne saurait vous échapper que les termes de "crimes contre l'humanité" recouvrent un concept juridique précis consacré par le droit international depuis l'Accord de Londres du 8 août 1945 et le Statut du Tribunal Militaire International de Nüremberg y annexé, les principes de droit international du Statut du Tribunal de Nüremberg ayant été depuis lors confirmés par diverses résolutions et conventions de l'Organisation des Nations Unies. Or, sur la base de ces textes, l'Etat d'Israël n'a jamais été déclaré coupable de crimes contre l'humanité devant une juridiction pénale internationale. 

En conséquence et conformément aux dispositions de l'article 42-1 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée et aux stipulations des articles 4-3-2 et 4-3-3 de votre convention, le Conseil a décidé, lors de sa séance plénière du 7 décembre 2004, d'engager la procédure de sanction prévue à l'article 42-7 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée.

Cette procédure est décrite aux articles 21 et suivants du règlement intérieur du Conseil supérieur de l'audiovisuel, dont vous trouverez une copie en annexe de ce courrier. Au terme de l'article 22 de ce règlement intérieur, vous êtes habilité à consulter votre dossier et à formuler des observations écrites, dans un délai fixé à sept jours compte tenu de l'urgence.

Quelle que soit, à l'issue de ce délai, la décision que prendra le Conseil (clore la procédure de sanction ou la poursuivre) au vu de vos observations écrites et du rapport de présentation préparé par la direction juridique du Conseil, dans les conditions prévues à l'article 23 du règlement intérieur, le Conseil vous entendra en assemblée plénière le vendredi 17 décembre 2004 à 15 heures au siège du CSA (7/11 quai André-Citroën, 75015 Paris). Il vous est possible, si vous le souhaitez, de vous faire représenter lors de cette audition.
 
Il va de soi que, dans le cas où la décision du Conseil, évoquée au paragraphe précédent, serait de poursuivre la procédure, il vous serait adressé avant l'audition une lettre de notification de cette décision, accompagnée du rapport de présentation préparé par la direction juridique."