Le Conseil supérieur de l’audiovisuel,
Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication, notamment ses articles 9 et 48 ;
Vu le décret du 13 novembre 1987 portant approbation des cahiers des missions et des charges de la société Radio France et de l’Institut national de l’audiovisuel ;
Vu le décret n° 2009-796 du 23 juin 2009 fixant le cahier des charges de la société nationale de programme France Télévisions ;
Vu le décret n° 2012-85 du 25 janvier 2012 fixant le cahier des charges de la société nationale de programme en charge de l’audiovisuel extérieur de la France ;
Vu la saisine du ministère de la culture et de la communication du 2 janvier 2017 portant sur un projet de décret portant modification des cahiers des charges des sociétés nationales de programme France Télévisions, Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France ;
Vu la saisine rectificative du ministère de la culture et de la communication du 6 février 2017 portant sur un projet de décret modifiant les cahiers des charges des sociétés nationales de programme France Télévisions, Radio France et la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France ;
Après en avoir délibéré le 22 février 2017,
Emet l’avis suivant, qui porte d’une part sur les règles de fonctionnement des comités relatifs à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes et, d’autre part, sur le renforcement des dispositions du cahier des charges de France Télévisions en matière de respect des droits et libertés. Il se réserve la possibilité de formuler ultérieurement des observations sur les autres propositions de modification des cahiers des charges des sociétés nationales de programme relevant tant de la saisine du 2 janvier que de la saisine du 6 février susvisées, ainsi que sur d’autres thématiques susceptibles de relever de ces cahiers des charges :
La loi n° 2016-1524 du 14 novembre 2016 visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias a introduit dans la loi du 30 septembre 1986 un article 30-8 qui prévoit qu’un comité relatif à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes composé de personnalités indépendantes doit être institué auprès de tout éditeur de radio généraliste à vocation nationale ou de télévision qui diffuse, par voie hertzienne terrestre, des émissions d’information politique et générale.
Les modifications des cahiers des charges des sociétés nationales de programme proposées par le Gouvernement visent notamment à définir les modalités de fonctionnement de ces comités.
Le Conseil note que d’autres dispositions de la loi précitée ont vocation à s’appliquer aux éditeurs publics comme privés et se réserve donc la possibilité d’édicter des règles générales susceptibles de s’appliquer aux sociétés nationales de programme.
En ce qui concerne la mise en place de comités relatifs à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes
Le Conseil note que les comités d’éthique sont une pièce centrale du dispositif voulu par le législateur. C’est la raison pour laquelle il souhaite formuler un certain nombre de remarques et de propositions pour améliorer son fonctionnement et garantir son efficacité.
Le Conseil prend acte du choix retenu dans le projet de décret de créer un comité par société nationale de programme. Il considère toutefois que lorsqu’une société ou un groupe édite un nombre important de pôles de diffusion, il pourrait être utile de ne pas se limiter à une seule instance. Il estime en outre qu’il serait justifié de créer un comité propre à chaque service d’information en continu, en raison de la spécificité de la programmation de ce type de service au regard des objectifs visés par la loi.
Le projet de texte prévoit que chaque comité est composé de cinq membres, nommés par le conseil d’administration, qui désigne parmi eux le président. Le Conseil considère que le nombre de membres devrait être plus élevé dès lors que le champ de compétences du comité, par nature divers, est large. Par ailleurs, il estime préférable que les membres du comité, indépendants à l’égard de l’éditeur en application de la loi, soient eux-mêmes chargés de désigner leur président. En outre, il apparaît souhaitable qu’une même personne ne puisse exercer plus de deux mandats consécutifs, afin de concilier continuité et renouvellement dans la composition de ces instances.
Afin de compléter les cas et modalités de révocation des membres, le Conseil suggère que le comité puisse proposer au conseil d’administration de mettre fin au mandat d’un membre qui ne respecterait pas les critères d’indépendance fixés au deuxième alinéa de l’article 30-8. La possibilité de révoquer, à la demande du comité, l’un de ses membres en cas d’absences répétées pourrait également être prévue.
Le projet de décret donne la possibilité au conseil d’administration de la société d’attribuer une indemnité aux membres du comité. Le Conseil considère que cette indemnité, qui constitue une forme de rémunération, n’est pas compatible avec l’indépendance qui s’attache à leur statut.
Le texte prévoit que le comité se réunit une fois au moins par semestre civil, des réunions pouvant également être organisées à la demande de son président ou de la majorité de ses membres. Considérant l’importance des missions qui lui sont confiées et le nombre de saisines ou consultations qu’il est susceptible d’avoir à traiter, en particulier lorsqu’il a compétence sur plusieurs pôles de diffusion, il semble essentiel que des réunions plus régulières soient fixées. Le Conseil propose en conséquence que le comité se réunisse au moins une fois par trimestre. Pour des raisons d’effectivité du rôle du comité, il propose par ailleurs que chacun de ses membres puisse demander l’inscription d’un dossier à l’ordre du jour d’une réunion.
Le projet de décret prévoit enfin que le comité peut entendre toute personne dont l’audition lui paraît de nature à l’éclairer. Le Conseil propose de lui ouvrir également la possibilité de se faire communiquer tout document susceptible d’éclairer ses travaux ou recherches, dans le respect des secrets protégés par la loi.
Le Conseil propose par ailleurs de compléter le projet de décret sur les aspects suivants.
Il considère tout d’abord nécessaire d’entourer la procédure d’instruction des dossiers par le comité de garanties de confidentialité notamment vis-à-vis des organes dirigeants. La disposition suivante pourrait ainsi être utilement retenue : « Il garantit l’anonymat de toute personne qui en appelle au comité si celle-ci le demande. »
Par ailleurs, le calendrier de publication et le contenu du rapport annuel pourraient être précisés dans les termes suivants :
« Le rapport annuel doit être publié dans les 3 mois suivant l’année écoulée. Il fait état notamment du nombre de demandes traitées au cours de l’année, du nombre de dossiers transmis au Conseil supérieur de l’audiovisuel, et il rend compte des résultats des délibérations du comité. Il dresse un état des moyens mis à la disposition du comité et expose les difficultés de toute nature auxquelles ce dernier pourrait être confronté dans l’exercice de ses missions. ».
Le Conseil estime enfin qu’offrir au comité la possibilité de publier certaines de ses décisions pourrait contribuer à l’efficacité de son action.
En ce qui concerne le renforcement des dispositions du cahier des charges de France Télévisions en matière de respect des droits et libertés
Le Conseil approuve les modifications des articles 35 et 36 du cahier des charges de France Télévisions apportées par les articles 6 et 8 du projet de décret qui correspondent aux propositions qu’il a formulées dans son avis n° 2016-9 du 4 mai 2016.
Le Conseil propose toutefois que la rédaction de l’article 8 du projet de décret soit clarifiée. En effet, le texte figurant au 2° de l’article 8, présenté comme un ajout, figure déjà au 5° de l’article 36 du cahier des charges de France Télévisions. Une modification de l’ordre des alinéas de l’article 36 ne semblant pas utile, il propose ainsi que soit supprimé le 2° de l’article 8 du projet de décret.
Le présent avis sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 22 février 2017
Pour le Conseil supérieur de l’audiovisuel :
Le Président,
Olivier SCHRAMECK